samedi 27 avril 2024

L'Égypte et ses pharaons

Si je vous dis ; "Pharaon, Pyramide, Nil" vous n'aurez aucune difficulté à poser un décor sur ces mots, tant il y a de documentaires et de films sur ce pays.

L’Égypte se situe en Afrique du Nord et fait partie du monde arabe mais ne fait pas partie des pays du Maghreb, vous me suivez ?

Elle est recouverte en grande majorité par le Sahara mais c'est pourtant le troisième pays le plus peuplé d'Afrique. Sa langue officielle est l'arabe Égyptien et son histoire remonte aux premières civilisations. 

Regardons la carte d'un peu plus près ...

L’Égypte est entourée de la Libye, du Soudan, d’Israël et de la bande de Gaza en Palestine. Des pays voisins d'une stabilité tout à fait relative !

Novembre 2023, nous avons la télé, la radio et l'interweb. Nous sommes donc au courant du conflit israélo-palestinien, alors nous éviterons d'aller faire les malins du côté de leurs frontières et nous nous cantonnerons sagement aux itinéraires touristiques classiques. Nous partons sereins. Et même si notre vol a été annulé une semaine avant le départ, on en a trouvé un autre, beaucoup moins cher bizarrement.

Notre avion décolle avec 2h50 de retard (pas 3h car sinon il aurait fallu nous rembourser, ça aurait été dommage) à cause d'une panne électronique. Après 2h30 de vol, le pilote nous annonce qu'il commence à amorcer la descente. Étant donné que la durée de vol entre Paris et le Caire est de 4h45, je fais rapidement le calcul et me dit que que cette histoire est louche ! Je regarde par le hublot ... Le paysage est drôlement vert pour l’Égypte !!!

Une fois sur le tarmac, le pilote nous annonce que nous avons bien atterri à "Rome" !!!! Ce pilote ne doit pas être très doué en Géographie. Nous attendons une explication mais tout l'équipage reste muet. Puis nous attendons, et nous attendons encore ...

Quand 3 flics entrent dans l'avion et se dirigent vers les premiers sièges pour arrêter un homme. La tension monte ...

- "I am egyptian!" hurle l'homme qui se défend.

Mais les flics semblent plus que déterminés à embarquer cet homme. 

Derrière nous, une passagère fait une crise d'angoisse. Allons donc !

Une fois que les flics sont sortis avec le passager et que la crise d'angoisse est maitrisée, nous restons dans l'avion, toujours sans explication, à patienter sagement. Dans sa plus grande bonté, le pilote nous annonce que les hôtesses vont nous servir un "petit" verre d'eau pour patienter. Je ne suis pas sereine, j'ai peur qu'ils nous le facturent.

Une heure s'écoule. Nouvelle annonce : On nous explique que l'avion doit être entièrement fouillé et que nous devons sortir et attendre dans l'aéroport. Nous attendons en zone d'embarquement jusqu'à minuit.

Avec toute cette histoire, nous atterrissons au Caire à 5h du matin, soit 12 heures après l'heure prévue. Et comme si nous n'avions pas eu notre dose de contre temps, la douane égyptienne décide de prendre son temps et fouiller notre valise à l'arrivée. Ils n'ont rien trouvé (c'était bien caché !!!).

Sachant que nous avions pris un bus de nuit pour nous rendre à Paris, dans lequel nous n'avions naturellement pas réussi à dormir, cela fait 2 nuits que nous sommes éveillés. Notre apparence est quelque part entre Picasso et Walking Dead.

On fait appel à un taxi UBER pour nous rendre dans notre studio Air BnB.  Le gentil chauffeur nommé Sameh nous amène ainsi jusqu'à notre destination en utilisant le GPS de mon téléphone (Il est loin le temps des voyages sans internet). Sameh ne parle pas anglais mais Google Traduction oui (Il est loin le temps des voyages sans internet). Ah pardon je radote ! 

Faut se l'avouer, Internet c'est quand même super pratique en voyage. Et le GPS quelle formidable invention ! Maintenant, je ne me perds presque plus !

Notre appartement est correct. Par contre, l'immeuble dans lequel il se trouve, semble être à l'abandon. On se rendra compte plus tard que c'est l'état d'à peu près tous les bâtiments de la ville. 

Des chats squattent dans la cage d'escaliers. Je suis contente, j'aime bien les chats. Ils sont omniprésents au Caire. Dans l'islam, le chat est apprécié et respecté. Il est admiré pour sa propreté. Le prophète Mahomet lui même interdit la persécution et le meurtre des chats. Les chiens n'ont malheureusement pas cette chance.


LE CAIRE / CAIRO

Une fois nos batteries rechargées, on part explorer Le Caire. C'est la capitale du pays et avec ses 20 millions d'habitants, c'est la ville la plus peuplée d'Afrique. 

Je retrouve les particularités des grandes villes surpeuplées. Une fourmilière humaine, un trafic routier ultra dense et chaotique, des klaxons incessants, des SDF, et surtout un taux très élevé de pollution. Dis comme ça, on pourrait croire que je suis à Paris, mais non. Car ici la pollution est nettement plus étouffante, d’autant plus qu'elle se combine avec la poussière de sable du désert. Mes poumons d'asthmatique saignent. Pour respirer un peu, on se rapproche du Nil qui traverse le Caire. 

Le voilà le fleuve légendaire dont nul ignore le nom. Ce fleuve nourricier qui a donné naissance au pays et qui rythme la vie de ses habitants depuis des millénaires. Cet indomptable qui se fait admirer autant qu'il se fait craindre. Il peut se révéler aussi généreux que sévère. Ses humeurs correspondent aux époques de gloire et de misère du pays. Notre regard se pose sur lui et se laisse bercer par ses flots, silencieusement, oubliant le temps qui passe. Le Nil est envoûtant.

Certains quartiers résidentiels permettent aussi d'échapper au bruit et à l'agitation, comme ceux de Garden City, Zamalek ou Gezirah. Dans ces coins plus calmes, on découvre de belles villas de style européen entourées de beaux jardins et de grands arbres. Ces quartiers rappellent que depuis la campagne de Napoléon Bonaparte (1798 - 1801) l’Égypte a passionné les européens et plus particulièrement les britanniques qui l'ont occupé de différentes manières pendant près d'un siècle.

Il est tellement dommage que ces villas soient en état de décrépitude. Les volets pendent au fenêtres cassées, les murs ont perdu leur couleur, recouverts par une épaisse couche crasseuse de pollution, cette même couche qui étouffe les grands arbres à l'agonie. Cet état avancé de dégradation fait mal au cœur. Est ce un manque de moyen ? une insensibilité au Patrimoine ? une volonté d'oublier ce passé colonialiste ? Ou bien peut être une combinaison de tous ces facteurs ...

La nuit, la ville est belle et agréable. L'ambiance est plus chaleureuse, il y a moins de voitures et de klaxons. Les égyptiens s'activent davantage lorsque le soleil est couché et que les températures sont plus clémentes. Toutes les boutiques, les épiceries, les fast-foods égyptiens sont ouverts jusqu'à tard. Dans la rue, les passants sont souriants. Nous ne ressentons aucune insécurité lors de nos errances dans les rues de la capitale. On peut manger ou boire un café dans un ahwa traditionnel à n'importe quelle heure. Par contre ce n'est pas facile de trouver de l'alcool, et comme nous sommes accros à notre petite bière fraîche de fin de journée, nous partons en mission. C'est finalement dans une communauté d'expatriés grecs que nous trouvons notre bonheur ! C'est le Greek Club. Un bar restaurant qui semble être "The place to be" pour la jeunesse branchée du Caire, les expatriés et les étudiants internationaux. Comme on y sert de l'alcool, l'endroit est relativement bien caché, et il faut s'acquitter d'une adhésion à l'association pour pouvoir en profiter. Dans ce petit jardin à l'ambiance chaleureuse on peut y déguster la Stella. Ne vous y détrompez pas, cette bière est bien brassée en Égypte, même si la marque appartient au groupe Heineken et que la brasserie a été initialement fondée par un belge !!! C'est une bière légère et rafraîchissante qui colle très bien avec le climat égyptien. 

photo extraite du site
"the Mediterranean dish"

Au Caire on goûte à la gastronomie locale, et on se souviendra particulièrement du koshari d'Abu Tarek. Ce restaurant sur 5 étages est une institution aussi bien pour les touristes que pour les locaux.

Le koshari est une spécialité culinaire locale composée de pâtes, de riz, de pois chiches, de lentilles, une sauce tomate vinaigrée, quelques piments et du citron. Un régal. Après une telle assiette, je pense avoir atteint mon quota annuel de féculents. Pour les petits encas, il y a les sandwiches falafels aux fèves dans la rue et il y a les délicieux jus de fruits frais comme il en existe "pas" chez nous. De plus, les commerçants et les serveurs sont toujours très sympas, tout comme les gens dans la rue qui nous aident avec plaisir à trouver notre chemin.

LE MUSÉE DU CAIRE

Nous poursuivons notre exploration en allant visiter le musée égyptien du Caire. Il est consacré à l’Égypte Antique et il fait partie des plus grands musées du monde, de par le nombre et la valeur des pièces qu'il abrite. 

Et maintenant, c'est l'heure d'une petite pause historique :

L'Égypte Antique s'étend sur une looooooongue période qui se situe entre -3000 ans av JC et le IVème siècle, lorsque le pays se fait absorber par l'Empire Romain.

Alors sortez vos vieux livres d'histoire. 

En - 3000 av JC en France, qu'est ce qu'il se passe ? Et bien c'est la période du Néolithique. On commence juste à se sédentariser et à organiser l'agriculture. Ensuite, il y a les Celtes qui arrivent et qui font des trucs chelous avec des gros cailloux ! C'est l'époque de Stonehenge par exemple, qui aurait été bâti quelque part entre 3000 et 1100 av JC, pour des raisons incertaines. C'est approximatif comme information, mais c'est un repère historique. 

À cette époque en Égypte ... 

Les pharaons aiment aussi les gros cailloux. Ils les taillent, les empilent et les assemblent pour construire des pyramides, parce que les premiers pharaons ils kiffent le triangle (contrairement aux Celtes qui préféraient les ronds et les croix). C'est à cette époque que fut construite la pyramide de Kheops, vers 2500 av JC. Des millions de pierres assemblées pour un monument de 280 coudées, soit 146,58 mètres de haut. Cette pyramide restera le monument le plus haut jusqu'au XIVème siècle.

Au concours de "C'est qui qui a la plus grosse ?" l’Égypte semble avoir remporté le prix.

 

Revenons en à notre musée :

 
Parmi les plus belles pièces de ce musée on a la Palette de Narmer, sur laquelle sont inscrits les plus vieux hiéroglyphes connus à ce jour. Ils datent de 3100 avant notre ère. Ils témoignent de l'unification de la Haute et de la Basse Égypte par le Roi Narmer.

Un autre chef d'œuvre du musée est le Trésor de Toutankhamon. Dans une belle salle à la lumière tamisée, on peut admirer le masque funéraire du pharaon, ses sarcophages, ses dagues et ses bijoux, le tout orné finement d'or et de pierres précieuses.  

 

Le musée abrite aussi de nombreuses statues, sarcophages, des étoffes, des sculptures, des objets dont on a encore du mal à trouver la fonction ... 

Un ustensile de cuisine 🤔 ?

Et des momies incroyablement bien conservées, sur lesquelles ont peut encore voir les cheveux, la barbe et les ongles. C'est tout simplement stupéfiant. Ces momies ont traversé des millénaires et se retrouvent là devant nous, avec leur visage paisible, comme si elles étaient simplement endormies.  


 

 

Par contre, quelque chose me turlupine. 

Les momies sont superposées dans des cercueils de verre poussiéreux et couverts de traces de doigts, empilés les uns sur les autres. Puis, au milieu d'une salle, un troupeau de touristes amassés autour d'un couple royal de momies, auxquelles on a ôté les masques funéraires. Ces deux âmes se sont donné tant de mal pour s'assurer le respect, le repos et la vie éternelle dans l'au delà. Pourtant, elles sont là, exhibées comme des bêtes de foire. Cette scène me fait de la peine et me met mal à l'aise. Je trouve cela irrespectueux et indécent.

De plus, il n'y a aucun panneau explicatif dans le musée. Nous aurions pu prendre un guide professionnel, mais là aussi c'est une mission que de trouver un vrai guide parmi tous ceux qui nous proposent leur service. Heureusement, mon ami Google nous accompagne et nous explique tout. (Cependant ne vous méprenez pas, Google est sympa mais il ne remplacera jamais un bon guide).

Pour la défense du musée, j'ai quand même une explication. Un nouveau musée est en construction du côté des pyramides de Gizeh. Les pièces sont déjà en cours d'acheminement de l'ancien vers le nouveau musée. Celui du Caire, au look bien obsolète, devrait donc bientôt fermer ses portes. Donc il est inutile de dépenser du temps et de l'argent pour son entretien.

Après avoir passé 4h dans le musée, on a faim et on a mal aux jambes. Nous allons au restaurant le plus proche en sachant pertinemment que nous le regretterons au moment de payer la note. Notre serveur devine très vite que nous sommes français et nous passe une playlist française, au grand dam des autres touristes internationaux présents. On a même droit à la Marseillaise. Si on voulait passer incognito, c'est râté ! De toute façon, en Égypte, quand on est touriste européen, il est absolument impossible de passer incognito. Ils nous voient arriver à des kilomètres, et nous interpellent avec toujours les mêmes références." Mon ami, La France, Jacques Chirac, Zidane et la Vache qui rit" . C'est toujours la même rengaine. 

Poursuivons notre exploration du Caire...

Nous prenons un taxi, le moyen le plus pratique et très économique pour se déplacer en Égypte. Ils ont le compas dans l’œil, ça on peut pas leur enlever. Au Tetris ce sont des champions. Dans les bouchons, la règle c'est qu'il n'y a pas de règle et que tout espace vide doit être comblé. Et en plus des voitures, il y a les piétons, les 2 roues et les chiens. C'est totalement chaotique. La plupart des taxis sont des 504 dont ils sont très fiers.  En règle générale, les automobilistes sont sereins au volant, c'est agréable. Ça nous change des Girondins. (Une petite blague médisante de temps en temps ne fait pas de mal). 

Par contre et comme partout, les chauffeurs de taxi ne sont pas toujours très honnêtes ! Il existe une multitude d'arnaques en tout genre. Il faut toujours se méfier, négocier le prix avant la course, savoir faire preuve de patience et s'assurer que le chauffeur ait bien compris la destination !!! Les échanges peuvent être un peu électriques parfois. Chaque course en taxi est une aventure en soi. On peut tomber sur des conducteurs gentils et prudents ou des chauffeurs dangereux et antipathiques. C'est comme jouer à la loterie ! Ceci dit, en dehors du fait qu'il n'y ait aucun code de la route, que les véhicules ne respectent aucune norme de sécurité, que fumer de l'herbe n'améliore pas les réflexes au volant et que conduire un taxi à 90 ans ce n'est pas une bonne idée, nous sommes toujours arrivés à bon port et c'est le principal.

LE VIEUX CAIRE

Dans le vieux Caire se trouvent 2 quartiers historiques. Le quartier Copte et le quartier Islamique.

Pour ma part, je n'avais jamais entendu parler des coptes avant d'arriver en Égypte. Pourtant, c'est un des plus anciens groupes chrétiens au monde. 

Pour la faire courte : En 30 avant notre ère l'Égypte passe sous domination romaine et Alexandrie en est la capitale. Une longue période de paix s'installe pendant laquelle le christianisme se répand dans le pays. L'évangéliste Marc fonde une église à Alexandrie, vers l'an 42, qui va donner naissance à la communauté copte orthodoxe d'Alexandrie.  Les coptes ont leur propre langue qui descend de l’égyptien ancien.

Puis, à partir du Vème siècle, les Byzantins envahissent et occupent le pays. Les coptes sont parfois victimes de persécutions, alors lorsque les Arabes musulmans envahissent l'Égypte au VIIème siècle, les coptes les accueillent comme des libérateurs. 

Pendant les siècles suivants, l'Égypte va passer sous la domination de plusieurs dynasties arabes musulmanes comme les Omeyyades, les Abbassides et les Fatimides. L'Égypte peu à peu se convertit à l'islam. Les coptes restent majoritaires jusqu'au XIVème siècle puis la cohabitation se gâte. Une partie des coptes s'exile vers l'Éthiopie. 

J'espère que ce résumé est à peu près clair, car j'ai sauté pas mal de chapitres.

2 quartiers, 2 ambiances ;

- Le quartier islamique est très très animé. Il y a beaucoup de monde et de bruit. Entre les marchés et les souks, c'est une énorme foire à ciel ouvert. Textiles, ferronneries, viandes, épices ... on y trouve de tout. Le quartier regorge de belles mosquées au décor finement sculpté, des écoles religieuses et des magnifiques maisons historiques qui nous plongent dans un décor des 1001 nuits. Ce quartier est un labyrinthe de ruelles étroites et de petits passages, tantôt sombres tantôt colorés, dans lesquels on aime se perdre. À la tombée de la nuit, les boutiques et les restaurants allument leurs loupiotes, les coupoles s'illuminent et le décor devient encore plus fantastique. 


 

- Dans le quartier Copte c'est plus calme et la circulation en voiture est restreinte. C'est un petit espace confiné dans lequel se trouvent les plus anciennes églises et synagogues d'Afrique. C'est aussi là que la première mosquée d'Égypte fut construite. Ce quartier fut construit à l'emplacement même d'une ancienne forteresse Romaine nommée Babylone, en mémoire à l'ancienne cité antique de Mésopotamie. Ainsi se mêlent les architectures et les influences du passé. Une église fut construite sur les piliers de l'ancienne Babylone. Cette prouesse architecturale date du IXème siècle. On l'appelle "L'église suspendue".

 

Que ce soit dans un quartier ou dans l'autre, on est constamment sollicités, surtout par les enfants, qui ne sont pas tous des petits anges !! Il y a beaucoup d'enfants en Égypte. Le taux de fécondité est de 3.5 enfants par femme.

Après ces quelques jours dans la capitale on a besoin d'un peu plus d'espace. Et puis ce qu'on est venus chercher ici, c'est l'Égypte des Pharaons. Alors Cap vers le Désert ...

Le plan A était d'aller voir les pyramides de Gizeh, mais nous avons fait la grave erreur de nous pointer à l'entrée du site, un vendredi (jour du Sabbat, c'est à dire le 1er jour du weekend égyptien) et à 10h, soit au moment de la plus forte influence !

Comment vous dire ? J'ai l'impression que c'est le 1er jour des soldes !

Devant la petite guérite ou 1 seule personne est supposée faire entrer des milliers de visiteurs, c'est le chaos. Les gens se montent les uns sur les autres. Ça crie, ça se bouscule ... Un homme nous fait des signes pour nous inviter à passer allégrement devant les gens qui font la queue (même si on ne peut pas vraiment appeler ça une queue, disons plutôt une meute !), dans le genre "pousses toi de là que je m'y mette!", nous faisant croire que nous sommes prioritaires, alors que non absolument pas ! Ensuite, il nous réclame un bakchich sous prétexte qu'il nous a aidé à avancer d'1 mètre dans la meute !!! Le site est géré de façon complètement archaïque et inadaptée, c'est l'anarchie. Comme dirait l'autre ; "Ils sont fous ces égyptiens !"

Franchement, quand on y pense : Les Pyramides de Gizeh, site touristique de renommée mondiale, les seules des sept merveilles du monde encore existantes de nos jours, la première destination touristique du pays depuis des siècles et ... Ils sont toujours pas prêts les gars ?! 

Bon enfin, Ça nous servira de leçon. Á l'avenir, ne rien prévoir les vendredis et samedis. Nous abandonnons les pyramides. Marche arrière dans la foule, on passe au plan B. 

Excusez ce faux départ. On l'a refait.

Nous ce qui nous botte, c'est l'Égypte des Pharaons, alors Cap vers le Désert, là où tout à commencé...

SAQQARAH

3000 av JC = L'Ancien Empire est marqué par le premier roi d’Égypte, MÉNÈS, qui va construire sa capitale à Memphis. Dans ce Memphis là on ne chante pas le blues, mais on bâtit une grande et forte nation réunissant la Hausse et la Basse Égypte. Vous vous rappelez de la palette de Narmer qui raconte cet épisode ? Narmer et Ménès ne sont en fait qu'une seule personne, soit le premier pharaon d'Égypte, première dynastie.

La capitale est à la grandeur de ses rois qui se succèdent et elle a besoin d'une nécropole royale pour que tous ces souverains puissent reposer en paix et pour l'éternité.

C'est à SAQQARAH que la nécropole royale sera établie et c'est précisément là où le complexe funéraire de Djeser sera construit en 2680 av JC. Notre "José" égyptien était Roi de la 3ème dynastie (oui, on en est déjà à la troisième génération de pharaons, ça s'enchaîne très vite, il faut suivre). Je me permets de l'appeler José car Djeser n'est pas son vrai nom de toute façon. Son nom original est imprononçable si bien que le peuple l'appelait Horus !!! 

À cette époque les tombeaux sont des mastabas. Des édifices rectangulaires en terre crue qui abritaient les sépultures de toute une famille.

José lui pour son tombeau, il veut innover. Il veut quelque chose qui en jette. Un monument unique qui lui permettra d'être en parfaite connexion avec la terre et le ciel. Pour cela, il fait appel à un célèbre architecte de l'époque, un certain IMHOTEP (la famille ça va ça va ! ). 

Ce projet va marquer un grand tournant dans l'architecture funéraire des pharaons, le rectangle fait place au Triangle, la pierre remplace la terre crue et la Première pyramide naît.

 

Elle n'est pas encore lisse, c'est une pyramide à degrés. Elle est comme un escalier qui mènerait l'âme depuis les profondeurs de la terre jusqu'au ciel infini. Cette pyramide est une révolution pour son époque, le plus grand monument jamais construit en Égypte. Et elle n'est pas seule. Autour d'elle se dressent des mastabas, des chapelles, des pavillons, des cours, une enceinte ... C'est un gigantesque complexe et la pyramide n'est que la face visible de l'iceberg. En dessous se trouve tout un réseau souterrain de pièces et de galeries qui donnent encore du fil à retordre aux archéologues et aux historiens.

Á Saqqarah, il y a un autre site très surprenant, c'est le SERAPEUM. 

Le Séra quoi ? Pas de Panique, Wikipedia, à notre service :

Dans le cadre plus strict de l’égyptologie, un sérapéum est une nécropole souterraine où étaient ensevelis les taureaux sacrés du culte d’Apis.

Ce site est impressionnant. Chaque taureau était momifié à Memphis, puis transporté en procession jusqu'à Saqqarah pour y être enterré dans un gigantesque sarcophage massif de granite, d'environ 80 tonnes. Les sarcophages étaient placés dans de grandes niches le long d'une galerie souterraine.

Le complexe de Saqqarah est immense, tellement grand qu'il faut un taxi pour aller d'un secteur à l'autre. Notre chauffeur de taxi est habitué bien sûr et nous attend à  chaque fois sur les parkings. Mais je ne pense pas qu'il avait prévu que nous soyons si longs. Bé oui, on aime prendre notre temps, fouiner, réfléchir, discuter, admirer, et surtout ressentir et s'imprégner des énergies. C'est quand même pas tous les jours qu'on visite des tombeaux de pharaons. 

Le site semble sans fin et il est toujours en cours de fouilles. C'est d'ailleurs le plus vaste site archéologique d'Égypte. Saqqarah est demeuré nécropole funéraire pendant 3500 ans, alors à mon avis, ils ont pas fini de creuser ! Les vestiges du passé sont partout. Il y a des éclats de vielles poteries sur le sol, des pierres gravées de hiéroglyphes, des trous profonds creusés par l'homme, qui sont en fait des puits au fond desquels reposent les momies. Attention où vous mettez les pieds, ce tombeau pourrait bien être votre tombeau ! 

Les visiteurs peuvent marcher librement entre les vestiges, mais pour rentrer à l'intérieur des tombeaux, il faut se faire accompagner de son gardien, en échange d'un petit bakchich. (En Égypte, le mot "bakchich" a été détourné de son sens et signifie désormais "pourboire" ou simplement "prix à payer"). Quand on a de la chance, on tombe sur un gardien qui a participé aux fouilles et qui connait l'histoire du tombeau qu'il garde. D'autres gardiens mal intentionnés vous proposeront d'entrer dans des passages interdits, car dangereux ou en cours de fouilles, pour avoir un plus gros bakchich. Il y a aussi ceux qui essayent de vous apporter des informations mais qui n'ont malheureusement pas les connaissances pour. 

Du genre ;

-  "Vous voyez sur ce hiéroglyphe on voit un oiseau et là un poisson, et maintenant salle suivante suivez moi ..." 

Il y a aussi ceux qui sont d'un calme absolu et qui vous accompagnent dans un total silence.  Ainsi, chaque visite de tombeau est une expérience unique, et on ne peut jamais échapper au bakchich. Je me demande combien ces hommes sont payés à rester là toute la journée. Ils n'ont même pas de toilettes. Résultat, ça sent la pisse et autre !!! Nous qui aimons nous faufiler dans des endroits cachés, ça nous a calmé. Finalement le chemin principal, c'est bien ! 

Les archéologues européens travaillent sous des tentes

Le site est tout simplement passionnant et nous y restons jusqu'au coucher du soleil (je pense que notre chauffeur de taxi a maudit notre rencontre). Le soir, au lieu de retourner dans le bruyant Caire nous décidons de passer une nuit à Gizeh au pied des pyramides, dans un hôtel. 

Gizeh est une grande ville récente qui a pour seul avantage d'être au pied du plateau où se trouvent les célèbres pyramides. Son expansion et celle du Caire font que les 2 villes se rejoignent. Ainsi, Gizeh fait partie de la métropole Cairote même si elle se trouve à 25 km de celle ci.

De nombreux hôtels ont été construits le long du plateau. Ils sont équipés de toit terrasse avec vue sur les pyramides. Un spectacle son et lumière carrément kitsch vient illuminer les pyramides chaque soir. Nous profitons de notre toit terrasse pour regarder le spectacle.

Le lendemain, forts d'expériences passées, nous nous levons tôt pour faire la queue à l'entrée des pyramides, et cette fois ci, ça passe comme une lettre à la poste. Enfin nous y sommes.

 

LES PYRAMIDES DE GIZEH

Les voilà, les magnifiques, les grandioses, les majestueeeeeuses, j'ai nommé : Les pyramides de Gizeh.

Elles intriguent et elles fascinent par leur imposante dimension et leur géométrie parfaite. Elles représentent la toute puissance des pharaons, le savoir faire et le génie des anciennes civilisations. 

Contrairement à ce qu'on raconte, les bâtisseurs n'étaient pas de simples esclaves mais des ouvriers bien formés et organisés. Et pendant la saison des crues, les agriculteurs ne pouvant plus cultiver leurs champs inondés par le Nil, rejoignaient les chantiers pour prêter main forte aux bâtisseurs. 

 

 

 Comme Saqqarah, le plateau de Gizeh était une nécropole royale située sur la rive ouest du Nil. Elle faisait partie d'un énorme ensemble funéraire qui s'étendait sur une trentaine de kilomètres. La partie de Gizeh regroupait 38 pyramides et plus de 9000 tombes. Mais aujourd'hui, de cet énorme complexe funéraire, il ne reste que 9 pyramides dont les 3 plus célèbres sont :


1) La Pyramide de Khéops.
 
C'est la plus ancienne pyramide de Gizeh et c'est la plus grande d'Égypte. Elle mesurait 146 mètres lorsqu'elle fut achevée en 2570 avant Jean Claude. Depuis, l'érosion lui a fait perdre un peu de  hauteur. Elle est la première des sept merveilles du monde et la seule à avoir survécu jusqu'à nos jours. Elle fut construite pour abriter le mausolée du pharaon KHEOPS sous la 4ème Dynastie. Ce tombeau est un chef-d'œuvre qui marque la consécration de toutes les techniques architecturales mises au point à cette époque. Son architecte s'appelle HEMIOUNOU. En plus d'être un formidable ingénieur, c'était le vizir de Khéops et un membre de la famille royale. Lui aussi repose dans la nécropole de Gizeh, dans un mastaba proche de sa pyramide. 
Il est encore tôt et la foule n'a pas eu le temps d'envahir le site. Nous en profitons pour rentrer dans la grande pyramide. Pour se faire, nous faisons la queue et montons un escalier rudimentaire sans protection pour atteindre l'ouverture, puis nous entrons dans les entrailles du géant. C'est une expérience dont je me rappellerai toute ma vie. À l'intérieur la chaleur est étouffante. Nous avançons très lentement, pliés, les uns derrière les autres dans un petit couloir étroit où nous ne pouvons pas tenir debout. 
Dans ce passage à double sens, il est difficile de se croiser. Claustrophobes s'abstenir ! C'est très anxiogène et je m'étonne qu'il n'y ait pas plus de victimes de crises d'angoisse. Enfin, ça doit quand même arriver, vu le vomi qu'il y a sur le sol !!!! 

Nous arrivons dans la Grande Galerie. Wow, cet espace est impressionnant. C'est un couloir étroit de 2 mètres de large et 8.5 mètres de haut. Au plafond, des énormes blocs de granite sont placés en encorbellement. On ne sait pas à quoi servait cette galerie, mais c'est à couper le souffle. Ensuite, on se faufile à nouveau dans un étroit passage mais cette fois, c'est à 4 pattes que nous avançons, jusqu'à à atteindre la Chambre du Roi (ou pas ! C'est peut être une fausse, un leurre pour déjouer les pilleurs !!! ). La pièce est murée et plafonnée d'énormes blocs de granite rouge. On peut sentir la pression de tout le poids qui nous entoure. On se sent assez vulnérables dans cet espace où juste 400 tonnes de granite sont posés là en dessus de nos têtes. Heu, c'est pas une fissure que je vois là ?  
Pour réduire la pression exercée par ces dalles, une autre chambre appelée chambre de décharge, se trouve au-dessus de la salle, et un système de ventilation moderne reprenant les gaines d'aération d'origine assure la circulation de l'air. Sinon, on étoufferait, c'est sûr. Les murs sont parfaitement polis et les blocs sont assemblés les uns aux autres avec une telle minutie, qu'il est impossible de passer une feuille de papier entre eux. Une prouesse qui intrigue. Le sarcophage du Roi est toujours là mais il est très endommagé. 
 
Nous restons quelques temps dans la chambre à la fois impressionnés et émerveillés, à tenter d'imaginer comment les hommes ont pu réaliser une telle prouesse. Puis, assommés par la chaleur et la pression, nous décidons de reprendre le même chemin jusqu'à la sortie. Les jambes tremblantes et le souffle court, nous sommes soulagés de revoir la lumière du jour et nous avons le sourire au lèvres. Waouuu c'était intense. L'atmosphère qui règne dans cette pyramide est unique. 
Une pyramide n'est jamais seule. Elle est toujours entourée d'un grand complexe funéraire qui comprend des temples des mastabas, et des pyramides secondaires et ... des barques solaires. En effet, autour de la pyramide, on voit des grandes fosses en forme de coque de bateau qui accueillaient des barques en cèdre libanais semi enterrées. 
 
Ces embarcations avaient pour rôle de transporter l'âme du Pharaon défunt vers le Nil puis vers l'Océan. Les ferris de l'au delà en quelques sortes. Dans les croyances de l'Égypte Antique, on pensait que tout ce qui était de l'ordre du vivant était issu d'un océan primordial. Après le décès, les âmes devaient rejoindre cet océan et le Pharaon était leur guide. On plaçait donc les embarcations autour de sa pyramide pour qu'il puisse remplir son rôle de guide divin. Les vivants venaient déposer de la nourriture dans les barques pour s'assurer que leurs défunts ne manquent de rien pendant leur voyage dans l'au delà. Et je ne vous parle de petites barquounettes de pêcheurs à la mouche. La barque du soleil de Kheops mesurait 43.50 mètres de long pour 4 mètres de large ! 

Il est plutôt agréable de marcher autour des pyramides. Pour les fainéants ou ceux qui auraient du mal à se déplacer vous pouvez toujours vous offrir les services d'un cheval ou d'un chameau pour aller d'une pyramide à l'autre. Pour les autres, à pied c'est largement faisable.

2) La Pyramide de Khéphren : 

Un peu moins haute que sa voisine (136m) cette pyramide a été construite pour KHEPHREN, le fils de Khéops, en 2520 avant Jean Christophe. Sur la partie supérieure de la pyramide, on voit encore le parement de pierres blanches calcaire. Autrefois, les pyramides étaient toutes blanches avec sur leur sommet, un petit pyramidion recouvert de feuilles d'or qui reflétait la lumière du soleil. Ainsi les pyramides étaient éblouissantes. À leur base, il y avait une partie noire, faite de granite. Des blocs très solides, assemblés comme les pièces d'un puzzle, qui assuraient le soutien de l'ensemble. 

3) la Pyramide de Mykérinos

C'est la plus petite. Elle fait 62 mètres de haut et elle a été construite pour le pharaon MYKERINOS, le fils de Khéphren. Vous l'avez compris, les trois pyramides représentent la transmission du royaume de père en fils.

La pyramide de Mykérinos présente une grande entaille, qui a été faite au XIIème siècle par le sultan de l'époque, qui voulait simplement voir rapidement ce qu'il y avait à l'intérieur !!!

4) Le Sphinx
 
Cette statue colossale a été sculptée à même la roche sous le règne de Khéphren, dont elle serait peut-être le portrait, puisque la tête du Sphinx est une figure humaine avec un némès rayé, le couvre-chef emblématique des pharaons.
 
 
Ce n'est pas Obélix qui a cassé le nez du sphinx et encore moins Napoléon, puisque des gravures antérieures à son arrivée représentaient déjà la statue sans nez. Le Sphinx a subi bien des agressions, telles les inondations, les tempêtes de sable et plus récemment, la pollution.
On ignore sa réelle fonction. Il existe plusieurs hypothèses que je ne vais pas énumérer ici. Il y a une multitude d'articles et de documentaires à ce sujet. Mais ce qu'on peut dire sans hésitation, c'est qu'il est absolument grandiose.

Une allée royale reliait la pyramide de Khéphren au temple de la vallée de Khéphren, qui jouxte le Sphinx, d'où l'idée que le gros chat représenterait ce pharaon. Ce temple incroyablement bien conservé, devait sûrement servir de temple d'accueil et on y accédait directement en bateau. Oui, parce que j'ai un scoop ! À l'époque des pharaons, le Nil n'était pas là où il se trouve aujourd'hui. Son lit a changé de place. Autrefois le Nil coulait juste au pied du plateau des pyramides de Gizeh. Ça devait en jeter grave !

Nous avons passé 5 heures sur le site des pyramides et comme le diraient les archéologues : "ça creuse!"

Nous retournons dans la ville et nous dénichons un restaurant qui paye pas de mine pour une délicieuse tajine.
 
 
Maintenant, Cap vers le Sud.

Pour nous y rendre, nous optons pour le train couchette, un moyen de transport très populaire chez les Égyptiens. C'est une solution plus écologique que l'avion et légèrement moins chère. La voie ferrée qui relie Le Caire à Assouan est bien entretenue et il y a plusieurs trains de jour et de nuit qui font le trajet dans les 2 sens et qui arrivent plus ou moins à l'heure. Les gares sont propres et bien organisées mais pour les étrangers ce n'est pas évident de s'y retrouver, étant donné que toutes les informations sont affichées en arabe. Mais comme on est jamais seul en Égypte, il y a toujours des âmes charitables pour vous amener sur le bon quai et vous indiquer votre wagon, dans la mesure où être à l'affût d'un bakchich signifie "être charitable". En général, c'est le personnel de gare ou les "dames pipi" qui proposent (ou imposent !) aux touristes leur service d'accompagnement. 
 
 
Le trajet dure 14h et comprend un plateau repas pour le dîner et un autre pour le petit déjeuner. Le personnel qui s'occupe des passagers est au petit soin, très serviable. Nous avons une cabine de 2 lits superposés. Les draps sont propres et les matelas assez confortables (pour des petits gabarits) mais la cabine est tellement dégueulasse qu'on ose pas poser les pieds nus sur la moquette. Le wagon WC est à l'ancienne avec une simple trappe qui s'ouvre pour déverser le contenu directement sur la voie ferrée. La propreté des toilettes est très approximative, disons qu'elle est à l'image de notre cabine. Mais il faut dire que ça secoue tellement dans le wagon qu'il n'est pas évident de viser droit dans le trou. Ce qui me gène autant que la saleté, c'est le prix : 95€ par personne ! Pour ce prix, je m'attendais à quelque chose d'un peu plus qualitatif. 
 
On est très fortement ballottés dans le train, tellement qu'il est impossible de lire. Nous avons tenté d'écouter des podcasts mais le train est tellement bruyant qu'on entendait rien. En plus du bruit du roulement, le train klaxonne tout le temps, sûrement pour avertir les gens ou les animaux qui squattent la voie ! Cependant, nous avons la chance d'avoir une cabine Deluxe, ce qui signifie que nous avons la climatisation ... dont nous nous serions bien passés. Il fait - 2 degrés dans la cabine et nous ne pouvons pas l'arrêter. Semblerait que le bouton ON/OFF tourne dans le vide !  Finalement, rester sous les couvertures et dormir est ce qu'il y a de mieux à faire et c'est bien le principe d'un wagon couchette !!!

Au petit matin, nous pouvons admirer le paysage. C'est comme de voir les paysages défiler sur une télé (dont l'écran serait très sale !). La voie ferrée longe les berges du Nil. Nous apercevons les champs cultivés, les agriculteurs et leurs ânes chargés de leurs sacs, les buffles en liberté, les dunes, les palmiers, les bananiers, les manguiers, les petits villages isolés ... tout en buvant notre café ... infecte. Oui, le petit déjeuner est vraiment pas terrible et boire le café sans s'en mettre partout relève de l'exploit. 
Malgré tout cela, et ça ne parait peut être pas dans mon récit, j'ai trouvé le trajet assez agréable, authentique et j'ai bien dormi, bercée par les mouvements du train. 
 
 
ASSOUAN

Nous arrivons en gare d'Assouan, au bord du Nil et des grandes dunes du Sahara occidental.
Le taxi nous amène jusqu'au Nubian Palace dans le village de Gharb Sehel, de l'autre côté du Nil, où nous posons nos bagages pour les trois prochaines nuits. Ce petit hôtel riche en couleurs, se trouve dans un village isolé loin du bruit et de la pollution de la ville d'Assouan. Ce village construit sur le sable a clairement une vocation touristique puisqu'on y trouve beaucoup d'hébergements et de boutiques d'artisanat local made in china !! La vue est magnifique, plongeante sur le Nil et ses felouques. 
Il fait très très chaud, déjà 40 degrés le matin. Après la climatisation du train, notre sang bouillonne. 
 
 
En attendant que notre chambre soit prête, nous nous installons sur les matelas de la terrasse et Ahrmed, le Chef du restaurant, nous y rejoint. Cet homme travaille 24/24, c'est à dire que les touristes peuvent manger à n'importe quelle heure. Il travaille non stop pendant 15 jours et ensuite il retourne dans son foyer avec sa femme et ses enfants à Louxor pendant quelques jours. Sacré rythme de travail. Il est très fier de ses enfants dont il raconte les brillants parcours professionnels. Sa femme dont les louanges sont nettement inférieures mais taquines, est professeur d'Anglais. C'est une femme indépendante.
Tout le personnel de cet établissement est gentil et souriant. Notre chambre est superbe et très propre. De loin le meilleur rapport qualité prix depuis le début de notre périple. (Hébergement trouvé quelques jours auparavant sur le site de "Booking.com", la technique la plus simple pour se loger en Égypte). 

La chaleur est intense, on ne tient plus sur les matelas, il nous faut de l'eau. Le Nil est juste là en bas et ce serait plutôt classe de s'y baigner. Nous avons quand même la présence d'esprit de nous renseigner quant aux crocodiles. Bonne nouvelle (enfin tout dépend du point de vue où l'on se place !), depuis la construction du barrage d'Assouan, il n'y a plus de crocodile dans le Nil. Ils sont tous coincés de l'autre côté du barrage, dans le Lac Nasser. Cependant, nous lisons quelque part qu'il peut y avoir des lâchers de crocodiles domestiques de temps en temps de notre côté !! Oui, parce qu'une croyance nubienne raconte qu'avoir un crocodile juvénile en cage sur le toit de sa maison porte chance au foyer !!!! Et quand le petit croco grandit et qu'il ne rentre plus dans sa cage, il est relâché dans le Nil, où il ne survivra que quelques jours sûrement. BRIGIIIIIIIIIIIITE !
 
Ce n'est pas 1 ou 2 crocos domestiques qui vont nous faire peur, alors nous partons à la recherche d'un endroit pour faire trempette. Nous repérons une petite crique entre les rochers en contre bas qui nous permettra de ne pas se faire emporter par le courant, l'autre grand danger du Nil et pas des moindres. L'eau est claire mais elle est glacée.  Nous qui voulions nous rafraichir, nous sommes servis. Quel bonheur !
Je ne me mets pas en maillot de bain puisque ce ne serait pas approprié. Nous faisons toujours attention à ne pas choquer les mœurs. Épaules et genoux couverts en toute circonstance. Ce n'est pas le cas de tout le monde et nous avons été choqués par les tenues de certains touristes dans les groupes des voyages organisés. Shorts ultra courts, décolletés plongeants ou hauts super sexy. Je suis un peu rabat joie et je trouverais ça indécent dans mon propre pays, mais ici, c'est carrément un manque de respect. Il semblerait qu'on ait un gros problème de sensibilisation, ou de bon sens, ou d'éducation, on ne sait pas. Mais fermons cette parenthèse et revenons en à notre bain. 

C'est quand même la classe de se baigner dans le Nil et c'est carrément régénérant. C'était très agréable jusqu'à ce que des jeunes filles nous aperçoivent du haut de la dune en nous criant des "Hello, where are you from?". Après un échange à hurler quelques mots d'anglais, les ados ont carrément pointé leur téléphone vers nous pour nous filmer sans pudeur. Mission incognito complètement loupée ! Légèrement agacés, nous sortons de l'eau. 
 
Nous apprendrons plus tard que la plaie du Nil (certains l'appellent même la onzième plaie d’Égypte), c'est un petit ver qui squatte les mollusques du fleuve. Il aime se faufiler sous la peau des baigneurs et provoquer de graves maladies, en attaquant notamment le foie. Un petit peu refroidis par cette information, nous ne retournerons plus nous baigner dans le Nil.

Après une bonne douche, nous retroussons nos manches et partons à la recherche d'un taxi boat. C'est pas difficile, il y en a partout. Le plus ardu est la négociation du prix de la course. C'est tellement pas facile lorsqu'on arrive dans un endroit et qu'on a aucune connaissance des valeurs. Pour nous, occidentaux qui n'en avons pas l'habitude, c'est extrêmement fatiguant de devoir tout négocier. Vive les prix fixes et affichés ! Il arrivera même qu'on renonce à certaines activités juste pour ne pas avoir à nous lancer dans d'interminables négociations. 

Nous trouvons notre bateau qui nous amène sur la rive Est. Souvent en Égypte, les villes et les gens habitent à l'Est du Nil. C'est le côté du levant, de l'action, de la vie. Alors qu'à l'ouest, c'est le côté du couchant, du calme, du recueil et du repos éternel, la mort en d'autres termes. Ainsi les nécropoles sont à l'Ouest et les villes à l'Est. Mais aujourd'hui on loge les touristes à l'ouest ! C'est peut être de là que vient l'expression. 

Dans les alentours d'Assouan, le Nil s'écoule paisiblement, ralenti par le grand et le vieux barrage, se faufilant entre une multitude de petites îles de granite ou couvertes de palmeraies. Paisiblement ce n'est qu'en apparence, car le courant peut être très fort dans les canaux et les passages étroits, qui peuvent prendre l'apparence de rapides, qu'on appelle "cataractes" ici.
 
D'un côté, les hautes dunes qui annoncent le désert puis sur les îles et sur l'autre berge, des villages colorés nubiens, des ruines d'anciennes forteresses antiques, des mausolées, des criques cachées et une multitude d'oiseaux guettant le poisson, aussi agiles qu'impassibles. Ibis, pélicans, hérons, martin pêcheurs, aigrettes ... Chaque traversée en bateau est un pur moment de bonheur et de sérénité, surtout au coucher du soleil, quand les teintes du ciel se multiplient et colorent le granite d'un rose pâle, et que les oiseaux sont au maximum de leur activité. La force tranquille à l'état pur. 
 
 


Avant de poursuivre notre exploration du Sud de l'Égypte, me vient l'envie d'éclaircir un point ... Un terme que j'ai mentionné et dont on entend beaucoup parler dans cette région .... Nubien ! Nubie ! Mais qu'est ce donc que ceci ? 
Une petite explication s'impose pour bien comprendre le rôle primordial d'Assouan dans l'histoire de l'Égypte. Je la fais courte c'est promis !

Assouan marquait la frontière entre l'Égypte pharaonique et la région de la Nubie, Porte de l'Afrique Noire. C'était un carrefour stratégique et commercial très prospère, sur la route des caravaniers d'Afrique. D'ailleurs "Assouan" en Égyptien Ancien se disait "Sounou", ce qui voulait dire "Commerce", comme quoi je ne vous raconte pas que des bobards.

La Nubie est la région qui s'étend le long du Nil entre Assouan et Khartoum ( Capitale du ????? ..... Soudan).  Ces terres étaient habitées par les premières civilisations d'Afrique, principalement nomades, avant de se faire conquérir par les pharaons d'Égypte qui appelaient la région Ta-Seti « le pays de l’arc » (l'arme de ses habitants). 
Et pourquoi donc que les pharaons voulaient absolument contrôler la Nubie ?
La situation stratégique et commerciale certes, mais aussi ... L'or ! Un texte hiéroglyphique raconte que l'or y était aussi abondant que la poussière des chemins. Ils savaient parler à l'époque !

La Nubie a parfaitement su tirer les avantages de cette annexion à tel point que la 15ème dynastie pharaonique (744 à 656 av. J.-C) a la particularité d'être uniquement Nubienne. C'est l'époque des pharaons noirs d’Égypte. 
Plus tard, au cours de l'histoire, la Nubie va voir défiler les envahisseurs et va se diviser jusqu'à la fin de la colonisation anglaise où elle va disparaitre, partagée entre l'Égypte et le Soudan. 
Cependant, ses habitants n'ont pas disparu eux, même s'ils ont pris cher à la construction du grand barrage d'Assouan. En effet, ils ont été chassés de leur maison et de leur terre qui furent engloutis par le lac du barrage. 
Aujourd'hui les Nubiens profitent du tourisme pour vivre et mettre en valeur leur culture. Leurs villages sont très décorés et colorés. Les nubiens ont leur propre musique, leur langue, leur art, leur artisanat et leur gastronomie. Et tout ça est parfaitement expliqué au musée nubien d'Assouan. Ce musée n'est pas très connu mais mérite vraiment qu'on s'y attarde. Il a été créé et financé en 1997 par l’Unesco et ses pays membres. L'idée était de conserver la mémoire de tout ce qui a disparu dans le lac Nasser et de rendre hommage aux Nubiens. Ce musée tout beau, tout propre, contient beaucoup de panneaux explicatifs, de reproductions et de mises en scène qui nous permettent de mieux comprendre ce peuple, descendant des premières grandes civilisations du monde.

Bon maintenant que ce point est éclairci, je comprend mieux pourquoi il y a des ruines antiques un peu partout. La région brassait du beau monde. Sur l'île Élefantine par exemple, on est accueillis par les ruines d'une ancienne forteresse (et aussi par des enfants qui chantent des comptines en langues étrangères pour attendrir les touristes, avec la main tendue espérant qu'on y dépose quelques livres égyptiennes. Nous avons eu droit à "alouette gentille alouette", mais eux n'eurent droit à rien car on ne donne pas d'argent aux enfants, non mais ! Cette île était un grand lieu de culte de KHNOUM. À vos souhait !

Khnoum, c'était le dieu égyptien à tête de bélier, le dieu de l'inondation. Autant vous dire qu'il est parfaitement à sa place dans cette région où se trouve un des plus grands barrage du monde. Et il était parfaitement à sa place aussi à l'antiquité, quand les crues du Nil rythmaient la vie du peuple, l'agriculture, les transports et le commerce. Il valait mieux ne pas se fâcher avec le grand khnoum. Et puis dans la culture ancestrale nubienne, il existait aussi un dieu à tête de bélier. Du coup, il a été facile de relier les deux cultes et de faire l'unanimité entre deux cultures. Quelle aubaine !
 
Sur l'île il y a aussi des villages nubiens, mais ceux là sont nettement moins flamboyants que ceux qui se trouvent sur notre rive. Ce sont de pauvres quartiers pas mal en ruine, mais ne manquant cependant pas de charme. Les maisons sont faites en terre cuite et lorsqu'elles se délabrent, il semblerait qu'elles ne soient pas reconstruites mais abandonnées pour être reconstruites ailleurs. On se balade dans ces villages authentiques comme dans un labyrinthe de ruelles étroites où se promènent librement poules, chiens, chats et vieillards souriants 
 
 
 
Une autre île exceptionnelle de la région est celle de PHILAE où se tenait le majestueux temple d'Isis.
Cette ancienne cité antique a été sauvée des eaux par l'UNESCO, qui a organisé le déménagement intégrale du site pierre par pierre, vers un site plus élevé protégé des inondations.
Ce fut un projet pharaonique, sans mauvais jeu de mots !

Alors, je souligne quand même qu'avant le déménagement, il était possible de visiter les ruines en bateau, se laissant dériver entre les colonnes du temple au fil de l'eau et ça devait être super cool !

Le temple d'Isis était un haut lieu de pèlerinage. Isis vous voyez qui c'est ? 
Déesse funéraire, sœur et épouse exemplaire d'Osiris (dans la mythologie antique l'inceste était coutume) et mère aimante d'Horus. Isis était la déesse favorite des égyptiens. Le temple de Philae date du VIIème siècle av JC et le culte s'y maintint jusqu'en 540 après JC, c'est à dire après la christianisation de l'Empire. Des siècles de rituels, de processions et de célébrations, qui se sont inscrits dans les pierres de Philae et qui rendent l’atmosphère du site particulièrement intense et mystique. 

 
Pour arriver sur cette île, nous avons choisi la méthode "black market" mais contre notre gré. Nous avons fait confiance au vieux du village, l'ami des touristes qui connait tout et tout le monde et dont le petit surnom réservé aux français est Eric Tabarly, puisqu'il était capitaine d'un bateau.  Il doit avoir un surnom et une histoire pour chaque nationalité. 
Pour soit disant nous rendre service, Eric appelle son ami, le jeune conducteur de tuktuk, qui nous amène jusqu'à un quai qui n'a absolument rien d'officiel et de là on prend un bateau, qui nous amène à un autre bateau, puis à un autre, l'histoire de prendre au passage le père, le cousin, refaire le plein etc... et il nous débarque sur l'île de Philae en nous disant "je reviens vous chercher dans 1h, ne soyez pas en retard !" Comme nous sommes les touristes les plus longs de l'histoire de l'Égypte, nos temps de visite font toujours le double de ceux annoncés. On arrive à négocier 30 minutes de plus, c'est mieux que rien.
Nous arrivons donc sur l'île et le gardien nous réclame notre billet d'entrée, que nous n'avons pas bien sûr. 
- "Comment ça vous n'avez pas votre ticket ? sans ticket vous ne passez pas !!!" 
Alors on hurle le nom de notre capitaine qui s'est amarré un peu plus loin pour qu'il revienne à notre rescousse. Celui ci hurle en retour depuis son bateau, fait quelques signes et le gardien comprend qu'il peut nous laisser passer, mais il tire franchement la tronche. C'est comme ça qu'on comprend que nous n'avons pas payé notre billet d'entrée, que le gardien touchera peut être un petit bakchich et que Éric Tabarly va toucher sa commission pour avoir fait prendre des risques aux autres. En soit on y gagne car on a payé beaucoup moins cher mais au lieu de participer à la conservation d'un patrimoine et aux salaires de ceux qui l'entretiennent, on a donné notre argent à un magouilleur mythomane.

Je vous ai parlé de frontières, de peuples et de cultes mais il y avait aussi une autre raison à la prospérité de la région ; Le granite. 
Des blocs énormes de granite, de schiste et d'albâtre étaient extraits des carrières d'Assouan puis acheminés par bateau sur le Nil pour la construction des villes, des temples, des obélisques et des pyramides. Le granite rose d'Assouan est unique, on ne le trouve que dans cette région.  L'obélisque qui trône Place de la Concorde à Paris vient de là.
Dans les carrières historiques d'Assouan, un immense obélisque inachevé est encore attaché à son lit de pierre, comme si les travailleurs avaient interrompu subitement leur œuvre et abandonné le site, le laissant ainsi figé dans le temps. C'est le plus grand obélisque connu à ce jour, long de 42 mètres. Cette œuvre a traversé les siècles pour raconter aux hommes d'aujourd'hui comment les carriers de l'Antiquité s'y prenaient pour réaliser de telles prouesses.

Dans un grand saladier, mettez un peu d'huile de coude, rajoutez y de la patience, une grande foi, du savoir faire et beaucoup d'ingéniosité et le tour est joué. Et comme l'erreur est humaine et que la magie n'existe pas, il y a des ratés, comme l'obélisque inachevé. Une grande fissure dans la roche a contraint les tailleurs à renoncer et abandonner ce qui représentait sûrement des mois de travail acharné. J'imagine alors la déception des tailleurs  en entendant le granite se fissurer. Mais tous ces efforts fournis n'ont pas été en vain, puisqu'au aujourd'hui cet obélisque nous a permis de résoudre pas mal d'énigmes sur les constructions antiques.
Nous savons que les blocs étaient taillés et polis sur place, puis détachés de leur socle de pierre par inclinaison (et j’avoue ne pas avoir bien saisi cette partie du processus !). Ensuite, nous supposons qu'ils aient été tirés le long de la pente jusqu'au Nil (là ça coince ! Aucune certitude sur le comment de la chose !) puis hissés sur les bateaux qui se trouvaient sur les rives sèches. Il fallait enfin attendre la crue pour remettre les bateaux naturellement à flot et transporter les blocs.

Pour tailler les blocs, c'est avec des outils rudimentaires comme le marteau et la boule de martelage que les Égyptiens travaillaient le granite. C'est difficile à croire mais "Exit" les extraterrestres et "Sorry" les conspirationnistes. Sur le site, il y a encore des boules de dolérite, une roche magmatique présente dans cette même région, utilisées selon des techniques de taille très spécifiques, dîtes "de percussion" ou "d'aplanissement". Nous avons essayé et même moi avec mes petites mains, j'ai réussi à tailler du granite. Donc je suis navrée de vous dire que la théorie des historiens et des archéologues est vérifiée, par moi-même ce qui n'a pas vraiment de valeur officielle je vous l'accorde. 

En crapahutant un peu sur les blocs, dans les sillons et les tranchées de la carrière, on aperçoit d'autres blocs immenses qui semblent dans le même état d'abandon soudain. Il y a dû en avoir des ratés !!!
Un autre détail qui me semble très important de souligner, c'est la chaleur. Le granite la garde, la restitue et la fait grimper ! Il n'y a pas d'air et absolument pas d'ombre, c'est carrément intenable. Alors pour les carriers de l'époque ça devait être un calvaire. J'espère pour eux qu'ils travaillaient de nuit !

Une autre curiosité de la ville d'Assouan est un hôtel un peu spécial ; le Old Cataract hôtel. 
C'est ici qu'Agatha Christie a écrit son roman "Mort sur le Nil" et c'est ce même hôtel qui apparaît dans le film adapté du roman. L'écrivaine avait dit de cet hôtel luxueux "cet hôtel regorge à présent de personnages notoires". En effet, Agatha était mariée à un archéologue. Pendant que monsieur fouillait le sol de l’Égypte, Madame laissait aller son inspiration depuis sa terrasse avec vue sur le Nil. 
Cet hôtel 5* à l'architecture coloniale britannique fut inauguré par Winston Churchill en personne, et de nombreuses personnalités y ont séjourné comme Antoine de St Exupéry, Diana Spencer ou encore André Malraux.
 
 
Nous avons terminée notre escapade à Assouan, il est temps pour nous de remettre le cap vers le Nord. 

Je garde quelques anecdotes et des souvenirs en poche, comme par exemple l'histoire du record du plus long trajet en taxi. Dans une 504 hors du temps avec un jeune chauffeur complètement bourré, de nuit et sans phare, il nous a fallu 1 heure pour faire 12 kilomètres. 

Je retiendrai aussi ce petit bar caché où l'on peut boire des bières avec des chats sur les genoux (j'en connais quelques unes qui surkifferaient cet endroit !).

Je me rappellerai aussi des chants des muezzins qui résonnent dans la ville et sur les flots du Nil, étouffant tous les autres sons le temps d'une prière. 

Des moments magiques comme ceux là qui font toute la typicité de l’Égypte.
 

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Pour atteindre notre prochaine destination, nous décidons de reprendre le train. D'après notre hôte, il y a un train qui part à 11h, pas besoin de réserver à l'avance. Ok ! 
On commande un taxi via l'application CAREEM, le Uber de l'Égypte, mais il met 1h pour arriver. Ça va être chaud pour le train de 11h ! Mais notre chauffeur fait tout pour rattraper son retard et nous arrivons à l'heure, qui l'aurait cru ? 
Sauf qu'à 11h il n'y a pas du tout de train !!!
Petit pic de rappel : "Celui qui t'indique la direction à prendre a peut être juste envie que tu t'en ailles." (Cherchez pas, elle est de moi celle là).
 
Nous devons attendre 3h pour le prochain train, qui mettra 3 heures pour arriver à destination + 2 h de retard. Et voilà comment perdre une journée ! 
Ce contretemps nous laisse le temps d'observer les gens à la gare, de voir comment les enfants sont exploités par les adultes pour faire le sale boulot à leur place, de nous faire entuber sur le prix d'un coca et d'une bouteille d'eau (nous n'avions pas vu qu'on était sur les Champs-Elysées), de nous engueuler avec Madame pipi qui veut nous faire payer trop cher son service d'accompagnement, et de faire une dizaine de grilles de mots croisés. 
 
Une fois dans le train nous avons un siège attitré, celui en face de la fenêtre brisée (si on voulait voir le paysage c'est raté), dans le wagon où il fait 6 degrès (je maudis l'inventeur de la climatisation). Nous arrivons de nuit à notre destination.


LOUXOR
 

C'est la deuxième ville la plus visitée du pays. Elle fut une des grandes capitales de l'Égypte Antique. Les Grecs la nommaient Thèbes (à ne pas confondre avec la ville de Thèbes en Grèce). Les Arabes l'appelèrent Al Uqsur (ce qui veut dire "les Palais") qui fut francisé plus tard en Louxor.
 
Dans la ville, les meublés touristiques se font concurrence. Ici tout est traduit en Anglais et le touriste est roi. On apprend en parlant avec les locaux que les propriétaires des hébergements et des restaurants sont souvent des investisseurs étrangers dont beaucoup d'Allemands, sans qu'on sache vraiment pourquoi. 

Pour se déplacer à Louxor c'est très simple.  La gare est accessible à pied depuis le centre ville ou depuis les quais. Un ferry fait la navette entre les rives Est et Ouest toutes les 15 minutes pour 20 centimes d'euros. Il y a aussi des bateaux privés qui proposent des traversées du fleuve pour 9€. Autant vous dire que face au 20 centimes du ferry, la traversée privée ne remporte pas un grand succès ! Sûrement une erreur d'étude de marché !
Dans la rue, les taxis nous hèlent et nous alpaguent comme si nous étions sur un champs de foire. Ils se livrent une concurrence acharnée, voir agressive. Je pense qu'à Louxor il y a davantage de taxis que d'habitants !

Nous n'avons aucune difficulté à trouver notre hôte, récupérer les clés de notre appartement et trouver un resto, celui où travaille notre hôte, multi casquetteOn s'installe à la table du couple qui vient juste de partir. Le serveur arrive, souffle sur la table.
- "Voilà c'est propre !" dit-il.

Notre serveur est aussi guide touristique (la polyvalence je vous dis !), alors on lui pose quelques questions sur ce qu'il y a à voir dans les environs.
Sa réponse :
- "Très bien, que voulez vous voir ?"
Vous le voyez le discours de sourd arriver ? ...
Comme j'ai quand même potassé un peu (beaucoup) mon lonely planet + une vingtaine de site internet (ne me jugez pas!), je lui balance 2 ou 3 noms de lieux que nous aimerions visiter et lui demande conseil pour nous y rendre. 
Mais qu'est ce que je n'avais pas fait ?! 
Le guide se lance subitement dans un long speech hyper rapide en "anglabe", (ou peut être était-ce de "l'ahrglais"). Voyant l'incompréhension sur notre visage, il sort un postit de sa poche et nous écrit des mots et des lettres complètement illisibles, tout en parlant aussi vite, nous plongeant un peu plus dans le néant.  
Une fois le long speech terminé, Monsieur reprend son souffle et demande :
- "Alors c'est ok, on y va demain ?" 
- "Heuuuu ... Est ce qu'on peut y réfléchir ?!" 
 
Du coup, on s'est débrouillés tout seuls, comme d'hab ! Et c'est parti, Louxor livres nous tes secrets !

Dans les guides, Louxor est décrite comme un musée à ciel ouvert et c'est vrai qu'il y a des ruines et des tombeaux absolument partout. 

Nous commençons par le site antique de KARNAK.
 
Quand ? Comment ? Quésako ? Karnakoi ?
 
Il s'agissait d'un gigantesque complexe religieux fortifié (qui s'étendait quand même sur 2km par Osiris !) composé de temples, de chapelles, de salles, de cours, d'Obélix ... isques, d'un lac, etc ...

Ce site fut occupé pendant plus de deux millénaires. Sa construction a débuté sous Sésostris 1er ( - 1962 et des grains de sable) à l'époque du Moyen Empire. Mais c'est le Nouvel Empire, de -1550 à - 1292, qui marque son âge d'or. C'est la période la plus prospère de l’Égypte Antique avec ces grands noms comme Amhenotep, Akhenaton, Toutankhamon, Ramsès ...
 
Karnak était dédié aux Dieux de la Triade Thébaine que sont ; le Grand Amon Rê, Dieu souverain de Thèbes, sa femme Mout surnommée "la Mère", et leur enfant Khonsou, surnommé "le voyageur".
 
On pouvait se rendre au temple en bateau depuis le Nil, grâce à un canal artificiel. Une grande allée processionnelle, appelée "Dromos", longue de 2km et bordée de 700 sphinx à tête de bélier, permettait de connecter le temple de Karnak à celui de la ville de Thèbes. 
 
 
Karnak est un mélange de grandiose et de puissance. La majestueuse qui nous rappelle à quel point nous sommes petits et vulnérables face aux Dieux et aux Souverains.
Le temple d'Amon est le plus grand édifice religieux jamais construit. Encore une victoire pharaonique au jeu de "Qui qui a la plus grosse ?"
 
80 0000 personnes travaillaient à Karnak, qui en plus de son territoire voué au bâtiments religieux, possédait également 276 400 hectares de terres agricoles, une flotte de 83 navires, 65 cités annexes et 421 000 têtes de bétail. Chaque procession à Karnak prenait l'allure d'un concert de mi temps d'un match de Superbowl ! Grâce aux impôts et aux offrandes perçus par le temple, la cité religieuse était riche et puissante. À sa tête, le Grand Prêtre D'Amon, le plus haut rang des prêtres, dirigeait également la ville de Thèbes sous le statut de Prêtre-Roi. Ce dernier était nommé directement par le Pharaon et il s'agissait souvent de dignitaires royaux ou de vizirs. 

 
 
Le joyau de Karnak c'est la grande salle hypostyle. En grec "hypostyle" signifie "soutenu par des colonnes". Admirez les riches décorations de celles-ci, et la différence de niveau au plafond pour soutenir l'ensemble et permettre à la lumière de passer par les interstices pour éclairer la pièce.

Après la visite de Karnak qui nous a pris une bonne demi journée et beaucoup d'eau, on a un peu mal aux pattes. Alors place à la détente. On a tellement aimé l'expérience du coucher de soleil sur le Nil que nous remettons ça, mais cette fois, en Felouque

La felouque, c'est le petit bateau à voile traditionnel du Nil. Notre capitaine, le jeune Mahrmoud, mène parfaitement sa barque avec son jeune cousin à qui il apprend le métier. Sur la felouque nous avons droit à un délicieux thé à l'anis et aux histoires de Marhmoud qui nous raconte la vie à Louxor. De ce jeune garçon avec qui nous passerons finalement la soirée, nous apprenons beaucoup sur le pays, la culture et les modes de vies. Je me rends compte qu'à force d'être sur les traces des habitants du passé, on en oublie les habitants d'aujourd'hui. 
Les touristes indépendants se font de plus en plus rares nous explique Mahrmoud. Depuis la révolution arabe de 2011, le tourisme a baissé en Égypte et les voyageurs optent de plus plus en plus pour les séjours organisés et les tours opérateurs privés appartenant aux fortunés ou aux étrangers, au détriment de l'économie locale. 

Les couleurs sur le Nil au coucher du soleil sont incroyables. Et quel silence, quel calme! Plus de klaxon ou de "Hello where are you from?".  Juste le bruit des clapotis sur l'eau noire du Nil et du vent dans les voiles. Nous avons de la chance car il y a une petite brise qui nous pousse juste comme il faut. Car il faut savoir que quand il n'y a pas de vent, les felouques partent quand même pour faire du sur place ou pour tourner en rond. Hors de question de rater l'occasion de se faire un petit billet. 
 
 
 

Dans la ville même, il y a un autre temple, lui aussi dédié à Amon Ré. La nuit, le temple est mis en valeur par un bel éclairage ce qui le rend particulièrement photogénique.  Ce temple se trouvait au cœur de l'ancienne Thèbes, relié à Karnak par une longue allée pavée de 2 km (dont j'ai déjà parlé, vous suivez ou bien ?). Il fut ordonné par AMENHOTEP III au Nouvel Empire, puis malmené pendant la révolution Religieuse d'AMENHOTEP IV, mieux connu sous le nom d'AKHENATON.
En effet, celui ci avait décidé de vénérer non plus Amon, mais Aton, un disque solaire qui représentait le Dieu Suprême. Ce culte n'aura duré que pendant son règne puisque les pharaons suivants reprirent le culte d'Amon et poursuivirent les travaux du temple. Plus tard, les Romains s'en serviront pour abriter un fort militaire. 
C'est de ce temple que provient l'obélisque de la Place de la Concorde à Paris depuis 1836 (Et si vous avez bien suivi, vous savez même où cet obélisque a été construit).
 
 
Alors maintenant que nous avons bien contempler les monuments religieux de la rive Est, partons à l'Ouest, chez les morts !!! 

LA VALLÉE DES ROIS

Nous entrons dans le paysage des montagnes Thébaines et allons au pied de la Cime, un des plus hauts sommets de ce massif montagneux. Il culmine à 420m d'altitude, ce qu'un savoyard appellerait une colline.
 
 
La vallée des Rois était la nécropole royale du Nouvel Empire. À cette époque, on ne construit plus de pyramides mais des "hypogées", soit une tombe souterraine creusée dans la montagne. Cependant, le souvenir des anciens pharaons reste présent et ce n'est pas un hasard si la nécropole se trouve au pied de la Cime, ce sommet lui même en forme de pyramide. 

Sous le Nouvel Empire, place à la discrétion. On se donne du mal pour cacher les tombeaux et leurs trésors afin de les mettre à l'abri des pilleurs. Un combat souvent perdu d'avance puisque les pilleurs avaient des taupes parmi le personnel chargé de la construction des tombeaux ! On dissimule les entrées, on trompe les vandales avec de faux tombeaux, on crée des passages secrets qu'on dissimule derrière du mobilier ou des statues ... En tout, 63 tombeaux ont été découverts dans cette nécropole dont ceux de Ramsès, de Thoutmosis, du grand Toutankhamon ... et tous ont été profanés ! Et bien au-delà, je fus très surprise d'apprendre qu'absolument tous les tombeaux, mastabas et pyramides d'Égypte ont été profanés. Dans de très rares cas et sans qu'on puisse l'expliquer, certains n'ont pas été vidés de leur trésor et c'est le cas du célèbre tombeau de Toutankhamon, découvert par Howard Carter en 1922. Howard le savait avant même de rentrer dans le tombeau, celui ci avait été pillé comme les autres, la porte d'entrée et la porte secrète avaient été forcées. Mais à l'intérieur tout était resté intact. Et Wow, quel trésor !!! Il ne faudra pas moins de 10 ans aux archéologues pour inventorier tous les objets du tombeau. Par quel miracle ce trésor est resté intact ? Est-ce le résultat d'un pillage raté pendant lequel les voleurs auraient été pris sur le fait ?  Le mystère demeure.

La plupart des pillages eurent lieu à l'époque de l'Antiquité. Mais qui étaient ces voleurs ? Pour qui travaillaient ils ? 

Les archéologues ont retrouvé des papyrus relatant des procès des pilleurs de tombes, dont les sentences étaient souvent fatales. Des mesures strictes furent prises par les pharaons et les prêtres pour protéger les tombeaux et dissuader les pilleurs. Une police spéciale de soldats "Medjay" fut même créée, mais rien n'y fit.

Une autre vague de pillages arriva au XIXème siècle pour le compte de collectionneurs Européens. Mes chers compatriotes, j'ai le regret de vous informer que l'Europe a participé aux pillages des trésors de l'Égypte. Si un jour vous avez l'occasion de vous balader dans les départements des antiquités égyptiennes des grands musées européens tel ; le Louvre, le British Muséum, Le Musée de Berlin, le Musée de Turin ... Demandez vous comment ces œuvres d'Art sont arrivées jusque là ...

On ne peux pas visiter tous les tombeaux de la nécropole. Certains ne sont pas aménagés, d'autres sont toujours en cours de fouilles, et puis d'autres encore sont fermés temporairement pour des raisons de maintenance. 

Le principe est simple. À l'entrée du site on paye notre ticket qui nous donne accès à 3 tombeaux, que nous devons choisir sur place, dans la liste des tombeaux ouverts. Cela nécessite d'avoir fait quelques recherches en amont car sur place il n'y a aucune information concernant l'état où le type de sépulture. À cela, nous pouvons ajouter des extras payants pour visiter des tombeaux qui ne font pas partie de la liste pour des raisons obscures. 

En général, on accède à un hypogée (10 points à celui qui arrive à placer ce mot dans une conversation !) par un couloir en pente. Certains tombeaux s'enfoncent jusqu'à 200 mètres sous terre par Toutatis ! Dans le tombeau on trouve des antichambres, des puits funéraires, des chapelles et des salles qui abritent les sarcophages. Le tout magnifiquement orné de gravures colorées, sculptées en haut ou en bas relief.

Ces gravures racontent des histoires, un peu comme une BD mais sans les bulles ! Ils relatent les épopées du défunt, ses exploits, ses échecs ... Ils peuvent raconter aussi des légendes mythologiques, des arts, des savoirs faire, des métiers, des épisodes de la vie quotidienne... 

Dans tous les tombeaux, on retrouve les gravures illustrant les offrandes alimentaires destinées au repas des morts. Sont représentés des hommes et des femmes portant de la nourriture et des boissons sur des plateaux, avançant les uns derrière les autres vers la porte céleste. Ce passage permettra au "Ka" (l'esprit du défunt) de repasser du monde des morts à celui des vivants, pour se délecter de cette nourriture spirituelle abondante et éternelle. Mais attention à l'entourloupe ! Certaines processions mènent vers de fausses portes, dans de fausses pièces, pour tromper non pas les pilleurs mais les mauvais esprits qui voudraient attaquer le défunt pendant sa collation. Ils ont pensé à tout !

En regardant vite fait, de loin, avec un œil peu attentif, ces représentations semblent être toutes les mêmes. Et pourtant, elles sont toutes uniques. Ici, pas de gravures faites à la chaine dans une usine, ooooh non ! C'est du fait main ça ! Quelle révélation, merci Sherlock ! 

En regardant de plus près, on découvre l'invisible. Les détails d'un muscle, d'un tendon, ou bien d'une ride, d'un rictus, d'un petit ventre rond ... Des détails qui évoqueront pour l'observateur averti une émotion, une volonté, comme un message caché entre les lignes qui viendrait trahir l'opinion de l'artiste ou le caractère du défunt. Les détails ... Ce sont eux qui font toute la différence et ce sont eux qui révèlent le talent de l'artiste.

Bon ça c'était pour les hiéroglyphes faciles. Car de ces gravures, on distingue l'écriture hiéroglyphique et là c'est une autre histoire. On y comprend rien mais c'est joli ! Chapeau Champollion !

 

Déjà faudrait- il savoir dans quel sens les lire ! De haut en bas, de droite à gauche ou de gauche à droite, tout est possible !!! Mais il y a une petite astuce quand même. Regardez les symboles représentant des humains ou des animaux et suivez leur regard. Il indique le sens de la lecture !

Il y a des symboles figuratifs qui signifient simplement la chose qu'ils représentent. Jusque là ça va, même si parfois il faut faire preuve d'un peu d'imagination. D'autres symboles représentent des sons, ou bien des lettres, ou encore le genre féminin ou masculin, le singulier ou le pluriel ... et puis il y a des symboles qui viennent modifier le sens d'autres symboles !!! Champollion disait : « C'est un système complexe, une écriture tout à la fois figurative, symbolique et phonétique, dans un même texte, une même phrase, je dirais presque dans un même mot » 

Ces écritures tapissent les parois des tombeaux ... et qu'est ce qu'elles racontent ? Et bien en résumé, ce sont des textes sacrés et des formules magiques de protection, de purification ou de transformation, destinés à guider le défunt dans l'autre monde et protéger son esprit dans l'au delà. Elles sont un aide-mémoire pour le défunt qui devra les réciter lorsqu'il s'adressera aux dieux, ou qu'il devra se défendre ou se protéger face à un danger potentiel.

Un petit exemple de formule magique ;  

LIVRE DES MORTS - CHAPITRE 83 - Formule pour prendre l'aspect d'un phénix :

 Je me suis envolé en dieu primordial, je suis venu à l'existence comme le scarabée d'or Khépri, j'ai poussé comme une plante, je me protège dans ma carapace comme une tortue ... 

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La vallée des Rois n'est pas la seule nécropole de Louxor. D'autres vallées de la montagne Thébaine cachent aussi des tombeaux, des temples et des sanctuaires où les prêtres et les sujets pouvaient pratiquer leur culte religieux. Ainsi, perdues au milieu d'un champ de ruines, deux statues monumentales sans visage nous accueillent sur la rive des morts. Elles tournent le dos à la montagne Thébaine et font face au Nil. Hautes de 18 mètres, elles dominent toute la vallée. On les appelle "les colosses de Memnon". Ils trônaient à l'entrée du temple funéraire d'Aménophis III dont il ne reste plus grand chose aujourd'hui. Pourtant, c'était le sanctuaire le plus vaste de la rive-ouest.

Les colosses avec le village de Gournah et la montagne thébaine en arrière plan
 

Des temples funéraires ce n'était pas ce qu'il manquait car chaque Pharaon avait le sien. Mais les reines avaient également leur mot à dire. En effet, dans la civilisation antique égyptienne, les femmes étaient les égales des hommes. Elles avaient le droit de posséder des terres, de gérer ou de prendre des décisions pour le royaume, elle pouvait régner seule, et elles avaient un devoir de conseil et de protection envers les princes et les pharaons. La place de la femme dans la société était une des grandes différences qui opposaient les civilisations égyptiennes aux civilisations romaines et grecques. Comme quoi on peut très bien jouer au jeu de "Qui qui a la plus grosse ? " sans être misogyne !! 

Parmi les femmes qui ont régné sur l'Égypte, tout le monde connaît Cléopâtre avec son histoire tragique à la Roméo et Juliette. Mais ce n'est pas d'elle dont je vais vous parler. 

HATSHEPSOUT (à vos souhaits !) était une grande reine d'Égypte dont le temple funéraire fut construit au pied de la montagne Thébaine. Son architecture est unique en Égypte. Le temple est encastré dans une falaise de même couleur, comme si on avait voulu le camoufler. Le site a été entièrement restauré. Malheureusement, ses hiéroglyphes sont plutôt abîmés et ses pièces sont vides.

La reine Hatshepsout a régné sur l'Égypte pendant le nouvel Empire, sous la 18ème dynastie, soit de 1479 jusqu'à sa mort, en 1457 avant JC. Et là accrochez vous car c'est un peu compliqué !

Hatshepsout est née à Thèbes. C'est la fille de Thoutmosis 1er qui lui donna une belle et riche éducation de princesse héritière. Elle se marie avec son demi frère Thoutmosis ( Ooooh ça va, ce n'est que de la demi consanguinité !). Le pharaon Thoutmosis 1er, le père donc, meurt. Son successeur devient donc pharaon sous le nom de Thoutmosis 2 et Hatshepsout devient de ce fait, reine. Plus tard, Thoutmosis 2  fricote avec une autre femme, avec laquelle il obtient un fils, un nouveau Thoutmosis. Quand Thoutmosis 2 meurt, la suite logique serait que son fils devienne roi sous le nom de Thoutmosis 3. Mais problème, tout s'est enchainé très vite et notre Thoutmosis 3 n'a que 5 ans ! Hatshepsout assure alors sa régence et règne à sa place sur l'Égypte comme Reine Pharaon. Hatchepsout est la première femme de pouvoir inscrite dans l'histoire.

 

Lors des cérémonies, elle prend le costume d'apparat des pharaons. Elle se déguise en homme puisqu'il n'existe pas de costume de pharaonne ! Elle porte un pagne court, un "némes" et même une barbe postiche. Mais en dehors des cérémonies il paraît qu'elle était très féminine. 

Comme tous les pharaons, elle s'invente une naissance divine pour justifier sa légitimité. C'est l'une des plus grandes bâtisseuses de l'ancienne Égypte. Elle a surpassé tous ses prédécesseurs en terme de grandiose et d'opulence. D'ailleurs, vous vous rappelez de l'obélisque inachevé d'Assouan ? Le plus grand de tous les obélisques ? Et bien c'était son idée !

Sa régence est une période assez prospère et relativement paisible. Elle a mené plusieurs expéditions victorieuses à l'étranger d'où elle ramenait des espèces végétales, des animaux, de l'ivoire et de l'or, ce qui a contribué à sa popularité. Son règne est resté secret très longtemps car Thoutmosis 3 a effacé sa trace des archives et s'est approprié ses projets. Jalousie ou rancœur, ne sera t-on jamais ! Ce n'est que lorsque Howard Carter redécouvrit sa tombe en 1903 qu'il recolla les pièces du puzzle et rendit son honneur à Hatchepsout. Sa tombe se trouve dans une falaise de la montagne thébaine, dans une étroite fente creusée par l'eau, à 28 mètres de hauteur. Ainsi, la reine reposait face au soleil couchant, dont les rayons venaient l'illuminer aux équinoxes d'automne.

Hatchepsout est morte alors qu'elle avait une cinquantaine d'années. Elle était obèse, souffrait de diabète et d'un cancer des os. Trop faible, elle serait morte d'un abcès dentaire mal soigné. Son règne a duré 22 ans.

En sortant du temple d'Hatchepsout nous remarquons d'autres vestiges un peu plus loin et décidons de nous y aventurer. L'endroit est complètement désert et un vieux panneau nous indique "Temple de Pasaba". Un vieil homme est assis à l'ombre d'une porte monumentale en ruine. C'est le gardien. Il nous annonce qu'on peut descendre dans le tombeau si nous voulons, mais lui est trop fatigué pour nous accompagner. Nous voyons là l'occasion idéale pour se retrouver seuls dans un endroit magique. La décoration du tombeau est sobre, mais l'absence totale de touristes à cet endroit nous plonge dans une ambiance silencieuse et mystique. Nous ressortons du tombeau et le vieil homme nous invite à marcher encore plus loin pour voir un autre site beaucoup plus intéressant. Comme il n'a pas le droit de nous laisser seuls mais qu'il n'a vraiment pas la force de nous accompagner, il nous remet la clé d'un tombeau et nous demande d'avancer très prudemment jusqu'à trouver le prochain gardien, à qui il nous faudra remettre les clés. Il nous fait promettre de ne pas les perdre et de rester sur le chemin. 

Nous nous retrouvons seuls avec la clé d'un tombeau en notre possession, à marcher sous un soleil torride, sur un chemin jalonné de morceaux de poteries cassées et de tissus de bandelettes de momies. C'est incroyable ! Nous avons l'impression d'être quelque part entre l'explorateur et le VIP. Quand arrive le gardien, je lui montre les clés et lui demande s'il veut que je lui fasse visiter un tombeau. Cette petite boutade le fait beaucoup rire. 

Cet homme aussi gentil que passionné nous fait descendre dans le tombeau des grands-parents de Toutankhamon. Les fouilles archéologiques ne sont pas terminées à cet endroit et c'est un peu le bazar mais notre gardien nous montre des gravures en haut relief d'une qualité remarquable, qui représentent des danses traditionnelles. L'artiste a décomposé chaque pas de danse, allant jusqu'à décomposer l’évolution des mouvements des cheveux des femmes ou des mains qui applaudissent, de telle sorte que si on avait un animographe, les danseuses et leur public reprendraient vie. Les détails sont superbes et les gravures parfaitement explicites. Nous avons là sous nos yeux un petit bijou qui nous donnerait bien envie de remonter dans le temps pour assister à ce spectacle. Nous sommes si enthousiastes que notre guide nous propose de nous amener à un autre site en cours de fouilles. Un tombeau à ciel ouvert dont les gravures sont différentes de tous les autres tombeaux qu'on a visité jusque là. Il s'agit de la tombe d'un prêtre. Les gravures représentent des symboles plutôt que des représentations de scènes ou d'incantations religieuses. Les archéologues n'ont pas encore élucidé le mystère de cette particularité. Affaire à suivre ...



Dans la vallée voisine de celle des rois, ce sont plus de 400 tombes qui ont été découvertes. On l'appelle la Vallée des Nobles et elle abritait les sépultures des hauts dignitaires et des proches du pharaon. Et dans la vallée suivante, appelée La Vallée des Reines, encore des tombeaux pour les femmes et les filles royales.

La construction de ces tombeaux employaient beaucoup de monde. Il fallait des bâtisseurs, des architectes, des artisans, des ouvriers, des gardes ... Pour loger cette main d’œuvre précieuse, il existait des villages à proximité des nécropoles. Et on ne parle pas là de logements saisonniers. Étant donné la présence de tombeaux au sein même des maisons des ouvriers, on peut en conclure qu'on était davantage sur du long terme. Encore une victoire de Sherlock !

Ces tombeaux plus modestes que ceux des grands personnages, étaient ornés de gravures racontant la vie quotidienne du "petit peuple". Une aubaine pour les archéologues qui ont pu ainsi nous rapporter la vie des égyptiens de la classe moyenne. Au milieu de cette nécropole se trouve le village de Gournah dont Père Castor va vous raconter l'histoire ... (Référence génération 90) !

"Quand les morts et les vivants se battent pour leur territoire"

Gournah était un village de pauvres gens construit au pied de la montagne thébaine, pile poil sur des vestiges de tombeaux antiques. Faut dire que la déco en jetait pas mal ! Sauf que quand l’État égyptien lança un projet de fouilles à cet endroit, ces habitants faisaient tâches dans le paysage. Ils furent simplement expropriés et un autre village fut reconstruit un peu plus loin pour les accueillir. Cela se passe en 1950 et c'est l'architecte Hassan FATHY qui fut chargé du projet. 

Hassan est d'origine nubienne. Il a fait l'école polytechnique du Caire et a occupé des hautes fonctions au sein de l'administration égyptienne. Pour ce projet nommé "New Gornah", il mit tout son humanisme à l’œuvre. L'idée étant de lier confort, tradition et développement durable, tout en restant accessible à une population défavorisée. Tout d'abord, l'architecte décide d'étudier le mode de vie de cette population et d'adapter les maisons en fonction de leurs besoins. Ensuite, il apprend aux futurs habitants une technique traditionnelle de construction, à base de briques de boue, tout en leur enseignant une perspective esthétique. C'est un projet dit "d'auto-construction". Cette idée originale attire l'attention de nombreux architectes et activistes du monde entier. Hassan en fera même un livre intitulé "Construire avec le peuple".

Malheureusement et malgré l'engouement général, le projet "New Gornah" ne fût jamais achevé pour cause de blocages administratifs.

Et fin de l'histoire .

Au retour de cette journée, c'est notre hôte qui vient nous chercher. Comme on a faillit mourir la veille avec un papi qui s'est endormi au volant, on a préféré jouer la prudence aujourd'hui. Notre hôte nous amène dans un restaurant typique égyptien. Pas de touristes ici. On nous sert une soupe et un plat accompagnés de plein de petites choses à picorer. C'est hyper copieux et c'est délicieux. Le tout pour 200£ égyptiennes soit 30€ pour 3, boissons comprises. (C'est évidemment moins cher pour les locaux.)

Et notre séjour à Louxor s'arrête ici. Nous reprenons à nouveau le train de nuit jusqu'au Caire. Et nous arrivons à la gare Ramsès au petit matin. 

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À la sortie de la gare, une centaine de chauffeurs de taxis nous sautent dessus, je frôle la crise d'angoisse, alors on s'éloigne un peu pour respirer et commander un taxi sur le Uber égyptien. Opération fiasco puisque nous n'avons jamais réussi à trouver notre chauffeur dans le brouhaha des rues du Caire. 

Résignés, nous acceptons le service d'un chauffeur de taxi qui était resté collé à nos basques depuis la sortie de la gare. 

Cette fois-ci nous avons réservé un hôtel dans un quartier que nous avions apprécié. Je mets le GPS sur mon téléphone pour montrer au chauffeur où se trouve l'hôtel. Celui-ci nous assure qu'il connait et c'est bien normal pour un taxi de connaître sa ville. Sauf que non ! Quand on réalise que le chauffeur ne va pas du tout dans la bonne direction, nous éloignant toujours un peu plus de notre hôtel, je me permets de lui montrer à nouveau le GPS ce qui l'agace fortement. Rendez vous compte, une touriste qui explique à un chauffeur de taxi par où passer, c'est la honte ! Le chauffeur demande quand même son chemin à un passant qui lui confirme ce que je vient de dire, et là c'est excessivement agaçant. Demi tour sans mot dire. Arrivé à destination, le chauffeur vexé au plus au point ne nous dit ni merci ni au revoir et repart. Voilà ce que j'appelle un accueil chaleureux.

Notre hébergement est correct si on fait abstraction du mur derrière le lit plein de champignons d'humidité, et l'absence de fenêtre dans une rue où on construit les fondations d'un immeuble au marteau piqueur, de nuit bien évidemment. Oui mais c'était pas cher !

Selon la loi des séries, la malchance n'arrive pas seule et nous nous apercevons que notre vol retour a été annulé sans explication. Merci Transavia, c'était vraiment top du début à la fin ! Du coup on partira un jour plus tôt avec Iberia. Ça nous laisse peu de temps. On opte donc pour une journée organisée pour Alexandrie.

Pour ce faire, nous faisons le tour de quelques agences de voyages pour demander des renseignements. Dans la première, une jeune fille dort sur son bureau et son collègue n'a apparemment pas reçu de formation puisqu'il n'a aucune réponse aux questions qu'on lui pose. Nous finissons par parlementer avec le soit disant boss par téléphone. Rien qui nous inspire la confiance. 

Dans la deuxième agence, nous tombons sur une jeune fille super professionnelle. Tout est parfaitement claire et tout cela avec le sourire. Bingo !

Le lendemain matin, notre chauffeur arrive à 6h30. C'est un jeune qui a une belle voiture toute propre. Il nous annonce 1h30 de route alors que le Gps affiche 2h30. Tiens, c'est étrange !


ALEXANDRIE .... ALEXANDRA 

Si vous aimez les sensations fortes, alors cette sortie est pour vous. "Fast and Furious" à côté c'est de la gnognotte.

Pourtant au départ, rien ne laissait présager un tel scénario  !! 

Après avoir quitté l'hôtel, on s'arrête très vite dans une station service pour faire le plein et prendre de l'eau. On se dit que pour une première pause c'est peut-être un peu tôt, mais on ne veut quand même pas passer pour des relous dès les premières 15 minutes de trajet ! 

Nous repartons, sortons de la capitale et arrivons sur une grande autoroute à 2 fois 5 voies, flambant neuve. À partir de là le cauchemar commence. Le chauffeur roule au maximum des capacités de sa voiture, l'aiguille ne pouvant pas dépasser les 180km/h au compteur. Tout cela en étant souvent au téléphone ou en tapotant des textos. Le principe de doubler par la gauche n'existe pas en Égypte. C'est la méthode du slalom qui est la plus courante. Cette technique a l'avantage de nous tenir en alerte ! La queue de poisson c'est du classique, le respect des distances entre les voitures, ça sert à rien. Et pour rajouter un peu de piment, plaçons quelques pièges et obstacles sur la route, tels des pneus, des morceaux d'arbres, ou des petits taxis fourgonnettes qui s'arrêtent là, pour prendre des passagers, après tout pourquoi pas !

Nous, à l'arrière, et nous n'avons pas peur de le dire, nous sommes terrifiés. La moindre erreur à cette vitesse et ce serait le drame. Et on ne peut pas dire que notre chauffeur soit très concerné par ce qu'il se passe sur la route. Il l'est davantage par son téléphone. 

Notre première technique et d'ignorer ce qu'il se passe en nous focalisant sur les paysages qui nous entourent. Seulement entre le Caire et Alexandrie il n'y a rien à voir. C'est du désert avec des énormes panneaux publicitaires de marques de luxe, et beaucoup de chantiers de construction d'habitats pavillonnaires pour riches, tout ce qu'on aime. 

La deuxième technique est de faire des mots fléchés. Mais au moment où le mot a trouvé est "crash", nous décidons d'arrêter ! Maudites synchronicités !

Plus on s'approche d'Alexandrie et plus le temps se gâte. La pluie, c'est exactement ce qu'il manquait !!!!

Là, j'en peux plus, j'ai trop mal au ventre et je demande à notre chauffeur de ralentir. Cet idiot me répond qu'il ne faut pas s'inquiéter car il a une bonne voiture et que c'est un bon conducteur. Je lui réponds que j'en ai rien à foutre et qu'il faut vraiment qu'il ralentisse car j'ai peur et que je suis en train de passer un très mauvais moment. Enfin le monsieur a compris et ralentit jusqu'à 130km/h, je me sens un peu mieux mais je pense quand même avoir perdu quelques années de vies.

Les abords d'Alexandrie ne sont pas très jolis puisqu'il s'agit d'une ville industrielle dont l'économie est basée sur ses raffineries, ses cimenteries et autres usines de chimie, mécanique ... Des cités d'immeubles uniformes purement inspirés du fonctionnalisme bordent la route. Sûrement des logements pratiques et moins chers pour loger la main d’œuvre et répondre à l'explosion démographique actuelle du pays. 

Puis nous arrivons dans la vieille Alexandrie, où les sirènes du port chantent encore la même mélodie, puisque c'est le premier du pays, et que la ville entière repose sur lui.

Pas de bol pour nous, il fait un sacré temps de m... de chien ! De la pluie du vent et du froid, c'est le combo gagnant. Mais c'est pas grave, nous braverons la tempête pour vous compter l'histoire d'Alexandrie. 

Sortez vos livres d'histoire !La ville d'Alexandrie a été fondée par Alexandre le Grand en 331 avant notre ère. Elle fut longtemps capitale du pays et même capitale de la Grèce antique à l'époque hellénistique, cette époque où la Grèce était sous domination romaine. Elle fut l'un des plus grands foyers culturels de la mer Méditerranée grâce à sa célèbre bibliothèque. 

Alexandrie est un carrefour d'art et de culture entre trois grandes civilisations que sont les Égyptiens, les Grecs et les Romains. Et ça, c'est pas de la tarte !

Nous commençons notre exploration par les catacombes. Notre chauffeur nous annonce que nous avons seulement 30 minutes pour visiter le site. On tique un peu ! Il nous explique qu'on ne peut pas trainer car nous devons repartir à 16h ! Heu pardon monsieur, mais ça, ce n'était pas dans le contrat ! Décidément il commence vraiment à nous échauffer la bile celui là. Qu'à cela ne tienne, nous répondons Amen et décidons de n'en faire qu'à notre tête. Au pire on repartira en train et ce sera plus sûr. 

Nous voici donc dans les catacombes, vestiges de la plus grande nécropole romaine d'Égypte. Son origine remonterait au deuxième siècle. Nous descendons un majestueux escalier en rotonde pour nous enfoncer dans les entrailles de la terre. Autour de cet escalier sont réparties en trois niveaux, 300 tombes et de nombreuses chambres funéraires. Le dernier niveau à 35 mètres de profondeur est inaccessible pour cause d'inondation. Cette construction est un prodige architectural. Elle a traversé les siècles pour arriver jusqu'à nous dans un état presque intact. Les décorations sont un mélange d'art égyptien, grec et romain, mêlant les divinités des trois mythologies. 

Beaucoup de mystères planent encore sur ce site. On y a découvert des restes d'humains et d'animaux,  des sarcophages, des poteries, de la nourriture, mais on ne connaît toujours pas l'identité des corps qui reposaient là. Je ne vous étonnerai pas en vous disant que ces catacombes ont elles aussi été pillées.

 Les Romains avaient adopté la technique de momification des Égyptiens en y rajoutant quelques particularités pour marquer leur différence.
 

Malgré l'afflux de touristes dans ces couloirs exigus et labyrinthiques, nous parvenons quand même à ressentir un sentiment de paix. En venant ici, on ne s'attendait pas du tout à une telle merveille. Nous ressortons des catacombes et retrouvons du réseau. Notre téléphone sonne car notre chauffeur nous a laissé plusieurs messages. C'est qu'il nous met la pression le monsieur !

Nous décidons ensuite d'aller visiter les vestiges d'un quartier résidentiel romain, datant lui aussi de l'époque gréco-romaine. Ce site archéologique présente les fondations d'anciennes villas de luxe dont certaines sont encore dotées de leur sol recouvert de mosaïques, des ruines d'un petit amphithéâtre, des vestiges de thermes et de leur système ingénieux de chauffage et de quelques colonnes et décorations des jardins qui agrémentaient ce quartier. Le Neuilly sur Seine de l'Alexandrie antique !

Voilà que le téléphone sonne encore. C'est à nouveau notre chauffeur qui nous demande de nous hâter. Il doit avoir un rencard qu'il ne veut vraiment pas rater.

Bonne nouvelle, la tempête se calme et nous avons même droit à quelques éclaircies lorsque nous arrivons sur la Corniche. Méditerranée te voilà ! La belle bleue sans qui Alexandrie n'existerait pas. La ville se situe sur le Delta où le Nil rencontre la Mer. Vous comprenez bien l'importance stratégique de cette ville pour tout le pays. 

 

À l'endroit où jadis se dressait le célèbre phare d'Alexandrie, septième merveille du monde antique, un Fort Citadelle fut édifié au XVème siècle dans le but de garder l'embouchure du Nil et protéger la ville de la menace ottomane. Ce fort militaire est un mélange d’architecture médiévale et d'un style mamelouk. C'est précisément là que la pierre de Rosette a été trouvée à la fin du XVIIIème siècle.  

Allez petit Quiz en 3 questions...

Premièrement, qu'est ce que la pierre de Rosette ? 

Et bien c'est ce fragment de stèle relatant un texte en hiéroglyphes Égyptiens, accompagné de sa traduction en égyptien ancien et en Grec ancien. C'est cette stèle qui a permis à Champollion de déchiffrer les hiéroglyphes. 

Cela nous amène à la deuxième question ; Pourquoi Rosette ? 

Et bien parce qu'elle proviendrait du village de Rosette, ville proche d'Alexandrie, qui était aussi prospère que sa voisine grâce à son port fluvial.

Troisième et dernière question ; Qui sont les mamelouks ? (ah, on rigole moins là !)

Les mamelouks étaient des soldats qui formaient une milice puissante d'aristocrates militaires, au cœur de l'armée Égyptienne. Cette dynastie a dominé l'Égypte pendant 2 siècles.  Leur origine est beaucoup moins glorieuse puisqu'il s'agissait d'esclaves et d'enfants païens (en arabe, mamlûk signifie « possédé ») enlevés puis ramenés en Égypte, convertis de force à l'islam et affranchis pour servir dans l'armée. 

Le Quiz est terminé, je vous remercie pour votre participation ! 

Le fort a été récemment rénové et la vue sur la mer et le port depuis le chemin de ronde est magnifique. On y trouve aussi un dédale de couloirs et d'escaliers, des cellules, des salles d'armes et un lieu de prière.

 

Nous sortons du Fort et retrouvons notre chauffeur, toujours dans la hâte, qui nous annonce qu'il nous amène directement à la prochaine destination avant de reprendre la route. Sauf qu'il est 13h et que nous avons faim. Nous lui faisons part de notre besoin de nous alimenter et il nous répond que lui ne mange pas à midi !!! Ce n'est pas vraiment la réponse qu'on attendait ! Nous nous permettons d'insister, ce qui l'agace davantage, et lorsqu'en plus je lui annonce que je suis végétarienne, alors là j'ai carrément droit au discours moralisateur anti végétarien. Profonde inspiration, méthode Boudha : rester calme et penser à un souvenir agréable !

Nous sortons victorieux du conflit car il se résigne à nous emmener dans un restaurant de la corniche qui semble être l'endroit où tous les gros bus touristiques font halte pour le déjeuner. Mai peu importe, nous on a faim, et en plus la vue sur la baie est superbe. 

Dehors, le temps se gâte à nouveau et le vent souffle fort. Nous voyons un vieux pêcheur assis au bout d'un ponton, seul avec sa canne à pêche. Il a bien du courage de pêcher avec le temps qu'il fait. Quand une grosse vague passe par dessus le ponton et manque de l'emporter, mon souffle se coupe. Une petite frayeur qui pousse notre pêcheur à vite abandonner son poste, me voilà rassurée ! Et un peu plus loin, que vois je ? Un homme à la mer ! Non, c'est aussi un pêcheur qui nage entre les barques pour les amarrer solidement à leur ancre. Sacré nageur, je suis impressionnée. Tout être normalement constitué serait déjà mort noyé mais pour lui, ça semble facile !

Notre chauffeur qui soit disant ne mange pas à midi se paye une grosse assiette et mange avec nous. Nous lui posons quelques questions pour détendre l'atmosphère et améliorer la communication mais ce jeune homme n'a pas grand chose à nous raconter. 

Une fois rassasiés, nous repartons en direction de la grande bibliothèque d'Alexandrie, la nouvelle bien sûr, puisque l'originale qui regroupait les ouvrages les plus importants de l'Antiquité, fut détruite par une série de guerres, de séismes, de raz de marée et d'incendies pour finalement disparaitre complètement des radars en 642 après JC.

C'est Ptolemée qui avait eu l'idée en 288 av JC, de rassembler tous les savoirs du monde sous forme de rouleaux de papyrus, jusqu'à en collectionner 700 000. Toutes les sciences et tous les arts étaient traduits en plusieurs langues et conservés dans ce temple du savoir. Tous les navires qui accostaient dans la baie d'Alexandrie devaient remettre les livres qu'ils avaient en leur possession à la bibliothèque pour y être recopiés, tout en sachant que leur restitution n'était pas garantie !

 La bibliothèque d'Alexandrie faisait partie d'un réseau de plusieurs centres de stockage d’œuvres, appelé "Museïon" ce qui voulait dire "temples des Muses". C'est de Museïon que nous vient le mot "Musée" et ça vous vaudra peut être un point de plus au trivial poursuite.

La nouvelle bibliothèque a été inaugurée en 2002. Elle est de style contemporain, recouverte d'inscriptions de 120 styles d'écritures différents, inclinée tel un navire fantôme qui surgirait des profondeur pour refaire surface. De nombreux pays ont collaboré par le biais de donations financières et matérielles. Dans l'espace francophone, on peut lire que la France a fait don de 500 000 ouvrages ainsi que des œuvres d'art. Au moment de notre visite, de très nombreux étudiants étaient penchés sur leurs livres ou sur les ordinateurs mis à leur disposition. La transmission du savoir se poursuit silencieusement à Alexandrie.

Voilà, il est 16h et il est temps de repartir au grand bonheur de notre chauffeur. Nous sommes finalement dans les temps, je ne comprends pas pourquoi il nous a tant mis la pression. Nous reprenons la route, traversons le centre ville désolé qui semble tout juste sorti d'une guerre. Des bâtiments sont écroulés, les gravas laissés au sol et recouverts d'ordures, des habitants logent dans des moitiés d'immeubles, c'est assez chaotique. Le trafic est comme partout, ultra dense. Plus on se rapproche de l'autoroute, plus mon estomac se tord car je sens bien que notre chauffeur est pressé d'arriver chez lui. Je ferme les yeux pour oublier et imagine que je suis sur une felouque qui vogue doucement sur le Nil. Quelques coups de volants me ramènent parfois à la réalité. Notre chauffeur semble tout de même un peu plus détendu et nous raconte des histoires et anecdotes sur le Caire et sur sa famille. C'était plutôt sympa jusqu'à ce qu'il vire sur un discours ultra conservateur et humiliant sur la place de la femme en société. À nouveau, grande inspiration, méthode bouddha ; rester calme et penser à la felouque !!! 

On a jamais été aussi contents d'arriver à destination, et contre toute attente, notre jeune chauffeur s'excusa pour ses dires un peu lourds avant de nous souhaiter une bonne soirée. 

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Pour notre dernière soirée au Caire, nous allons boire une bière sur notre terrasse favorite du Greek club, puis nous commandons à emporter à la chaine de fast-food égyptien "Gad", d'un rapport qualité prix inégalable, autant sur les plats que sur la sympathie des serveurs. Nous mangeons dans notre chambre en visionnant sur notre téléphone des documentaires sur l’Égypte, comme pour valider nos nouvelles connaissances.

Le lendemain, grasse matinée (bien appréciée étant donné que le marteau piqueur s'est arrêté à 5h du matin) un peu de shopping souvenirs et un dernier koshari depuis le 5eme étage du restaurant ABU TAREK.


Il est temps de clôturer ce long article sur l’Égypte. Ce pays qui nous a autant fasciné que fatigué mais qui nous a clairement fait déconnecter de notre quotidien, voir même, de notre dimension spatiotemporelle. 

Merci beaucoup à ceux qui sont arrivés jusqu'à ces dernières lignes. J'espère que vous avez passé un agréable moment en me lisant.

 Je vous souhaite un joyeux retour à votre quotidien et à très bientôt 😊


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